Ils ont beau avoir été emprisonnés, leurs noms sont cités dans quasiment toutes les grosses saisies d’héroïne à Maurice. Et le parrain des parrains demeure Peroomal Veeren. Aussi appelé Gros Veeren, il est soupçonné d’avoir distribué de la drogue synthétique lors de la fête qu’il a donnée en prison pour ses 40 ans. Condamné à une lourde peine pour trafic de drogue, il portait ostensiblement un collier en or évalué à Rs 800 000 pour démontrer son statut de caïd alors qu’aucun bijou ou pendentif n’est permis en milieu carcéral.

Peroomal Veeren est connu pour être le trafiquant le plus actif de la prison et il se paie même le luxe d’avoir des prisonniers à sa botte, lesquels lui font jusqu’à sa toilette. Son répertoire téléphonique et son agenda, sur lequel il note les sommes qui lui sont dues, se sont révélés être une véritable boîte de Pandore pour la coommission d’enquête sur les drogues. L’Independent Commission against Corruption (ICAC) mène une enquête parallèle basée sur ces données.

Ayant précédemment gagné sa vie comme simple vigile, il a pu se payer les services de 26 hommes de loi, lesquels semblent ne s’être pas posé de questions quant à l’argent avec lequel ils ont été payés. Jusqu’à récemment, il les a même utilisés pour poursuivre des journalistes, leur reprochant de l’avoir traité de caïd et qui ont fait état de sa soirée d’anniversaire. Ce qui pousse la commission d’enquête à réclamer que l’enquête sur la cagnotte de Rs 1,5 million remise à l’avocat Rex Stephen soit approfondie.

Peroomal Veeren, note la commission, s’est justifié devant elle quant à ses activités illicites derrière les barreaux : les avocats lui réclament de grosses sommes et il doit faire de sorte de les payer. Si des gardiens de prison ont été agressés sur ses ordres, c’est parce qu’ils auraient accepté un deal qu’ils n’ont pas honoré. Le parrain ne s’est pas laissé aller à des confidences sur Siddick Islam, alias Ti Nerf, dont les proches tirent les ficelles du trafic de drogue à la Plaine-Verte.

Tout comme Peroomal Veeren, Siddick Islam dit avoir grassement payé des avocats pour sa défense. Il brandit le chiffre de Rs 25 millions. Son épouse, Nasera Vavra, alias la Reine de Plaine-Verte, mène un grand train de vie et elle serait de mèche avec Khalil Ramoly et le policier suspendu Schabir Goolamgouse – accessoirement le fils d’un ancien haut gradé de l’Anti Drug and Smuggling Unit (ADSU) et ex-beau-frère de Sada Curpen – pour mener à bien ses activités illicites.

Siddick Islam a été en contact téléphonique avec Khalil Ramoly, son présumé blanchisseur qui est propriétaire d’un garage à l’entrée de Vallée-des-Prêtres, et de son voisin, Shahebzada Noormohamed Azaree. Ce dernier est le patron de la Gloria Fast Food, et a arrêté dans l’affaire des 1,2 kilo d’héroïne récupéré par le policier Moonsamy Govind Basana-Reddi, du Passport and Immigration Office (PIO), dans une poubelle des toilettes publiques dans le hall des arrivées au Sir Seewoosagur Ramgoolam International Airport (SSRIA) il y a treize mois.

Peroomal Veeren ne pipe mot non plus sur Curly Chowrimoothoo, alias Ti Nana, dont les «jockeys» à la solde de ses cousins, les Townsend, officient quotidiennement à côté du terrain de football de Cité Kennedy, à Quatre-Bornes, au vu et au su des autorités. Trois Toyota RAV-4, une Nissan Murano et plusieurs voitures nippones sont garées à côté de la maison – bardée de caméras de vidéosurveillance – de cette famille dont aucun membre n’a officiellement un emploi pouvant lui permettre d’acheter autant de véhicules.

Un stock de Rs 100 millions d’héroïne a été saisi au domicile de Curly Chowrimothoo, à Cité Kennedy, en mai 2016. La drogue a été acheminée par une vedette rapide depuis Madagascar. La belle-mère du caïd, Chantal Petit – dont le fils Cédric vient d’être arrêté dans cette affaire après deux ans de cavale – a été en contact téléphonique avec Peroomal Veeren et des trafiquants de moindre importance. Nommément Gérald Prosper et Lina Gentil, maîtresse de Steve Serret, alias Polocco, un des hommes impliqué dans la mort de Denis Fine, un des maillons du trafic de Subutex entre Paris et Plaisance.

Chantal Petit a été à Madagascar à plusieurs reprises, notamment avec sa fille, Samantha Chowrimoothoo, et elle a déclaré à la commission Lam Shang Leen qu’elle était impliqué dans l’importation de grains secs. Elle n’a cependant pu expliquer comment elle fait, ni quelles sont les procédures pour une telle activité. Elle a quand même alimenté le téléphone portable de Lina Gentil qui serait l’une des assistantes de Peroomal Veeren. Celui-ci aurait également la famille Jhureea à sa solde. Le fils, John Paul Jhureea, a été coincé pour avoir pris livraison d’un stock d’héroïne d’un avocat ghanéen récemment condamné sur ordre du parrain, mais il ne l’a jamais impliqué.

La sœur de John Paul Jhureea, Mary Jane Jhureea a été appréhendée par l’ADSU en décembre dernier et leur mère, Marie Josée Jhureea, s’est offerte une BMW à Rs 1,5 million alors qu’elle touche officiellement Rs 5 000 par mois comme salariée du Couvent Fille de Marie et perçoit près de Rs 24 000 comme location. La dame, ainsi que sa fille, Rachelle Joannick Jhurrea, a été en contact avec Peroomal Veeren ainsi qu’avec un gardien de prison condamné pour trafic de drogue.

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