Il a été l’homme le plus décrié de la séance parlementaire de la semaine dernière. Mais ce mardi, Sanjeev Teeluckdharry, le Deputy Speaker de l’Assemblée nationale, arrive dans l’hémicycle sans que l’opposition ne lui prête attention.
Du côté de la majorité, la place d’Anwar Husnoo, en déplacement à l’étranger, est vide. Côté opposition, celles de Shakeel Mohamed et de Roshi Bhadain le sont aussi. Alain Wong est, lui, bien présent. Il arrive dans l’hémicycle avec de gros dossiers sous le bras. Il regarde en direction de l’opposition avec un léger sourire. Le ministre de l’Intégration sociale partage au moins une chose en commun avec son ancien leader, ce mardi, la couleur de la cravate : bordeaux.
Assis à sa place, Wong ajuste ses lunettes et plonge immédiatement dans ses dossiers. Le ministre met de l’ordre méticuleusement dans ses feuilles. Fazila Jeewa-Daureeawoo, à sa gauche, et Sunil Bholah, à sa droite, l’aident tant bien que mal dans sa tâche.
La Speaker Maya Hanoomanjee fait son entrée. L’opposition, qui scandait « mille fois Maya » mardi dernier, se lève cette fois-ci ensemble pour saluer la présidente de l’Assemblée nationale. Le boycott du PMSD à son égard semble levé. « Enfin ! » lance le Chief Whip Maneesh Gobin, tout sourire.
La parole est au leader de l’opposition. Appliqué, Xavier Duval lit sa Private Notice Question portant sur la refonte du système d’aide à travers la responsabilité sociale des entreprises et la lutte contre la pauvreté. En face, Alain Wong fixe le chef des bleus. Le ministre n’a pas l’air tendu, il redresse même son micro, comme impatient de lire sa réponse. Duval se rassied. Wong se lance.
Quelques instants plus tard, il est coupé net dans son élan par le point of order du leader de l’opposition. Le ministre prend trop de temps pour répondre, se plaint Duval. Maya Hanoomanjee acquiesce et demande à Wong de terminer ses propos liminaires et de répondre précisément aux questions posées. Les députés du PMSD montrent à nouveau leur agacement quand les réponses longuettes de Wong conduisent leur leader à soulever à nouveau le même point of order.
Wong poursuit. Et rappelle des décisions et politiques d’un de ses prédécesseurs à ce ministère : Xavier Duval. Celui-ci se montre tantôt en colère, tantôt agacé, voire amusé par les fréquentes références au temps où il était ministre de l’Intégration sociale. L’agacement n’a pas le temps de gagner Maya Hanoomanjee toutefois. Intolérante envers les sonneries de téléphone portable, la Speaker regarde en direction d’Eddy Boissezon. Le ministre de la Fonction publique a éteint en quatrième vitesse son téléphone portable qui vient juste de sonner. Il plaide en silence en regardant la Speaker pour s’excuser.
Pendant ce temps, Wong est bombardé de questions supplémentaires par Xavier Duval. Si les réponses du ministre sont parfois approximatives, il arrive toutefois à garder sa contenance face au chef de l’opposition. C’est que le ministre a du renfort : à chaque question supplémentaire, son staff gribouille à la va-vite des éléments de réponses sur un bout de papier qui arrive au ministre rapidement. A côté de Wong, Fazila Jeewa-Daureeawoo regarde son collègue se débrouiller. Tandis que plus loin, dans la galerie, sir Bhinod Bacha suit les échanges avec la plus grande attention. Plus tôt, la réponse d’Alain Wong en main, le conseiller du Premier ministre a suivi chaque phrase du ministre.
Si ce sont surtout ses anciens camarades du PMSD qui cherchent à déstabiliser Wong, Rajesh Bhagwan se met de temps en temps aussi de la partie. Comme quand Duval se demande si ce ne sont pas surtout les zones rurales qui ont bénéficié de la construction de logements sociaux pour les Mauriciens les plus défavorisés. « Naz enn kout al rod repons-la », ironise l’élu du MMM en regardant Wong, nageur émérite. Plus tard, il s’inquiète que la série de questions du leader de l’opposition ne fasse s’étrangler le ministre.
Le mauvais quart d’heure passé. Wong se rassied. Si Duval l’a pressé de questions, le ministre de l’Intégration sociale semble avoir pris l’épreuve de manière sportive. Il rigole ainsi de bon cœur avec sa voisine pendant que démarre la tranche des questions dédiées au Premier ministre.
Les premières questions laissent la place à celle sur les berlines achetées par les ministres. Pravind Jugnauth explique les procédures suivies pour l’achat de ces grosses cylindrées. Mais une question supplémentaire du Chief Whip Maneesh Gobin permet au Premier ministre de parler de celui qui a occupé son poste jusqu’à décembre 2014. Le chef du gouvernement égrène les achats de Navin Ramgoolam, une BMW de Rs 19 millions en 2010, une Mercedes de Rs 20 millions en 2011. Une autre BMW à Rs 23 millions, celle-là, fin 2013.
« Bizin ena klas sa », lance-t-on des travées du gouvernement, une boutade qui fait rire tout l’hémicycle. Et Pravind Jugnauth aussi. Qui contient mal son amusement quand Reza Uteem lui demande si sa voiture de fonction abrite des gadgets comme des sièges massants, des lecteurs DVD et un frigo. « Je vais vérifier et revenir avec des réponses », rigole le Premier ministre.