Reporters sans frontières (RSF) condamne les modifications «dangereuses»  de l’Information and Communication Technologies Act (ICT Act). Dans un communiqué émis dans la soirée du vendredi 16 novembre, l’organisation internationale de défense de la liberté de la presse appelle au réexamen de ce texte de loi par le gouvernement mauricien.

RSF explique qu’il est désormais possible qu’un message «contrariant» puisse valoir, pour celui qui l’envoie ou le diffuse sur internet, une peine de dix ans de prison. «À l’origine, la loi sur l’information et les télécommunications de 2001 (ICTA) ne mentionnait que les messages entraînant l’anxiété ou la détresse chez leurs destinataires, des pathologies pouvant être constatées à l’aide d’une évaluation psychologique», fait-elle ressortir.

«Mais pour “remettre de l’ordre” et lutter contre les “dérives” sur internet, Barlen Vyapoory, le président par intérim de Maurice, vient d’approuver des modifications qui ouvrent la possibilité pour tout individu de porter plainte et d’obtenir réparation pour une publication, un commentaire, un partage, et même un “j’aime” “dérangeant”, “humiliant” ou “contrariant”», indique RSF quelques heures à peine après les déclarations de l’Attorney General Maneesh Gobin lors d’un débat à Ebène.

«Le caractère extrêmement vague et large de ces nouveaux motifs de poursuite est d’autant plus inquiétant que la peine maximale encourue pour l’ensemble des délits mentionnés a doublé, passant de cinq à dix années d’emprisonnement, alors même qu’il n’est plus nécessaire de démontrer l’intention de nuire pour établir l’infraction, cette mention ayant été supprimée», poursuit RSF.

«A un an des élections législatives, la critique de l’action gouvernementale sur internet risque d’exposer les journalistes qui exercent leur rôle de contre-pouvoir à une multiplication des poursuites voire à des peines extrêmement lourdes», considère Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique de RSF. «Ce durcissement législatif est également en totale contradiction avec les promesses faites en 2014 par le parti au pouvoir d’adopter une loi facilitant l’accès à l’information que les Mauriciens attendent toujours», fait valoir RSF.

Elle cite le directeur de publication de L’Express qui trouve suspecte cette démarche en période pré-électorale. De même que Rabin Bhujun, rédacteur en chef du site d’Ionnews qui, lui, s’inquiète de la possible instrumentalisation de cette loi par des «personnes influentes» pour en faire «un outil d’intimidation ou de harcèlement», exposant les personnes dénoncées à «des arrestation et de longs interrogatoires».

RSF rappelle que Maurice occupe la 56ème place dans son classement mondial de la liberté de la presse pour 2018.

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