Klopp, Guardiola, Pochettino, Solksjær… ils ont tous ce problème. Après chacun de leurs matchs, des milliers de personnes contredisent leurs choix tactiques et expliquent ce que ces entraîneurs auraient dû faire pour gagner ou mieux écraser l’adversaire. A Maurice, à chaque épisode d’intempérie, des milliers d’experts-es-météorologie reproduisent le même schéma.

Certains journalistes se font ainsi un devoir d’accabler la station météo de Vacoas. En incitant aussi leur audience à le faire, notamment en appelant en renfort leur propre «expert» amateur pour mieux humilier ceux qui ont pourtant été formés au métier de prévisionniste.

Ce dimanche, la décision de Météo Maurice d’émettre un avis de fortes pluies, puis de le retirer pour ensuite le remettre le lendemain et le maintenir durant cette journée du 28 janvier a déclenché un torrent de critiques. Occupés à chasser l’abominable homme de la météo, on en a oublié de rappeler quelques faits.

Le premier rappel nécessaire concerne le fonctionnement même des alertes émises par la station de Vacoas. Dans l’empressement collectif à insulter nos prévisionnistes, on en oublie que notre système national d’alerte – cyclone et pluie torrentielle – dépend d’observations factuelles. Ainsi, l’avis de pluie torrentielle n’est déclenchée que quand 100 mm de pluie sont enregistrés pendant une période de 12 heures et quand cette situation est susceptible de durer. L’alerte cyclonique 4 entre en vigueur seulement quand le pays est balayé par des rafales de 120 km/h. Les alertes 1 à 3 sont également émises selon des cas très précis.

Comparativement, l’avis de fortes pluies est un bâtard. Né de l’incapacité de la station météo de Vacoas d’endosser – seule – la lourde responsabilité de conduire des dizaines de milliers d’écoliers, de collégiens et d’étudiants à rester chez eux. Mais aussi de la volonté des autorités publiques – après les inondations meurtrières de mars 2013 – de disposer d’un outil plus ou moins flexible permettant de suspendre les cours dans le pays.

A vrai dire, au-delà des cas spécifiques où des chefs d’établissement peuvent prendre les décisions qui s’imposent, ni la météo, ni le ministère de Leela Devi Dookun-Luchoomun ne devraient pouvoir décider de la suspension des classes. Cette décision, suivant un protocole clair et connu de tous, devrait échoir au National Disaster Risk Reduction and Management Centre placé sous le Prime minister’s Office et non sous la coupe de ministres dont la spécialité semble être de brasser de l’air.

En l’absence d’un processus de prise de décision, ce ne sont malheureusement pas les responsables politiques qui sont pointés du doigt mais une nouvelle fois la station météo nationale. C’est d’ailleurs un schéma qui n’est pas propre à Maurice. Occupés à vilipender les prévisionnistes, comme c’est désormais leur habitude, les Mauriciens en oublient de relativiser leurs critiques.

Météo France, par qui jurent de nombreux compatriotes, fait aussi l’objet de sévères critiques. De la part du Premier ministre de la France mais aussi de ses compatriotes. Les Américains, que de nombreux Mauriciens considèrent comme les champions de la météo, ne sont pas exempts de reproches. «Why isn’t the U.S. better at predicting extreme weather?» titrait, il n’y a pas si longtemps, le New York Times Magazine.

Si ailleurs, la météorologie n’est pas une science exacte, pourquoi devrait-elle l’être à Maurice ? Si la discipline n’est pas fiable à 100%, l’instinct des parents mérite, lui, d’être suivi. Après tout, avec ou sans alerte de pluie torrentielle ou de forte pluie, les parents sont tout à fait en mesure de décider s’ils souhaitent envoyer ou pas leur progéniture en classe. Ils n’ont pas besoin d’un avis leur rappelant leur responsabilité parentale pour cela !

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