Kolos fête ses 20 ans à Maurice. Comment se porte le cimentier ?

Très bien ma foi ! Après vingt ans d’activité, Kolos est devenu un acteur incontournable de la construction à Maurice. Nous sommes leader de la distribution du ciment à Maurice en particulier dans le secteur des quincailleries devant, excusez du peu, le premier cimentier mondial. Mais c’est surtout la confiance que nous accordent nos clients qui est notre meilleure réussite et notre plus grande fierté.

Que de chemin parcouru… Quels ont été les moments marquants pour Kolos ?

Les principales étapes de la vie de la société, après sa création et son démarrage en 2000 par le Groupe Gamma Civic, ont été : le partenariat avec le Groupe Holcim qui entre au capital de la société en 2001 à hauteur de 51 %. Ce partenariat s’est construit et poursuivi harmonieusement durant de nombreuses années. En 2004, la société abandonne son nom Ciments de l’Océan Indien pour s’appeler Holcim Mauritius. En 2012, c’est le lancement du premier ‘blended cement’ à Maurice et des sacs de 25 kg. En 2014, les ventes se font exclusivement sur palette et le sac de 50 kg est abandonné. En 2015, avec le rapprochement au niveau mondial de Lafarge et Holcim, et afin de respecter les règles de la concurrence à Maurice, Holcim revend sa participation dans la société au Groupe Gamma Civic. Dans la foulée la société change de nom et devient Kolos Cement Ltd. La même année 2015 la société ouvre son premier dépôt Kolos Building Materials à Rose-Belle. En février 2018, la société fait une entrée fracassante à la Bourse de Maurice. En 2020, Kolos perd tragiquement son Chairman, Carl Ah-Teck. Avec lui elle perd un de ses fondateurs et son principal mentor.

Comment Kolos a-t-il changé le paysage mauricien ?

Depuis sa création nous avons participé à tous les grands chantiers de Maurice que ce soit le nouveau terminal de l’aéroport, les barrages tels que Bagatelle ou Midlands, l’extension du port à Mer Rouge, le centre sportif de Côte-d’Or, ou plus récemment le Metro Express. Oui Kolos a contribué à « Bâtir l’Ile Maurice de demain » non seulement en participant activement à ces projets mais aussi par son action citoyenne au travers de son école des maçons ou de son action en faveur de la sécurité sur nos routes et au travail.

Comment le confinement a-t-il impacté la firme ? Est-ce que vous prévoyez une amélioration d’ici peu ?

Nous avons connu une année exceptionnelle en 2019. Avant la pandémie, nous avions anticipé une contraction de 18 %. En cumul à fin mai, la baisse du volume marché du ciment était de l’ordre de 50 % par rapport à l’année dernière. A la reprise en juin nous avons pu observer une reprise vigoureuse de l’activité. Tous les chantiers lancés avant la pandémie ont repris et tous les opérateurs ont voulu rattraper le retard pris. Il semblerait donc qu’une bonne partie du retard dans la consommation de ciment sera rattrapée. Certes notre résultat sera en recul par rapport à 2019 mais la catastrophe sera évitée. Cependant, nous ne prévoyons pas d’amélioration à court terme. Je dirais même que l’avenir est très incertain. Le rebond observé cet hiver est lié aux chantiers lancés ou commandés et financés avant la pandémie. Le lancement de nouveaux chantiers, en particulier dans l’habitat privé, est en net recul. Ceci impactera très fortement le niveau d’activité pour 2021. Ceci pourrait être encore plus aggravé par une récession économique liée à la disparition de pans entiers de l’économie avec l’arrêt du tourisme.

Ce secteur compte plusieurs opérateurs. Peut-on parler de compétition saine s’agissant des prix ?

Oui la compétition est saine. Outre le fait que nous sommes, comme tous les secteurs d’activité, soumis au contrôle de la Competition Commission, une simple comparaison avec nos voisins nous permet d’affirmer que les prix de ciment pratiqués à Maurice sont les plus bas de l’océan Indien.

Quels sont les objectifs de Kolos sur le court et moyen terme ?

Avec la crise de la Covid-19 associée à la crise climatique nous devons nous réinventer. L’enjeu des prochaines années sera de devenir plus digital, mais aussi plus local. Notre empreinte sur le climat devra être maîtrisée et surtout notre résilience devra être notre préoccupation. Ceci passera par notre volonté de continuer sur la voie que nous avons tracée à savoir toujours avoir nos clients au cœur de nos préoccupations.

Quel est votre regard sur le secteur de la construction ?

Le secteur de la construction a été durement touché par la pandémie. Plus de deux mois d’inactivité ont largement touché la rentabilité car cette activité doit supporter beaucoup de charges fixes. Les opérateurs ont ensuite mis les bouchées doubles pour rattraper les retards de chantiers, ce qui a pu entraîner des frais supplémentaires. Les chantiers du gouvernement annoncés à l’occasion du Budget sont venus à point nommé pour apporter un soutien à cette activité essentielle au pays. Ceci devrait permettre d’éviter le naufrage de sociétés supplémentaires après celui de PadCo.

La construction est tirée par les nombreux projets infrastructurels publics. Est-ce suffisant pour que la bonne santé du secteur perdure ?

Il faut savoir que près des deux tiers de la consommation de ciment est faite sur les projets de construction privée. Les projets d’infrastructure publics vont permettre de maintenir à flot le secteur en particulier pour les sociétés de construction, mais ces projets ne pourront remplacer la construction individuelle si celle-ci s’effondre. C’est un risque important car comment envisager qu’un couple de Mauriciens se lance dans la construction de sa maison s’il craint pour son emploi. Une forte récession économique aura un impact majeur sur notre volume d’activité.

Un des plus gros problèmes à Maurice demeure le logement surtout pour les plus démunis. Comment peut-on améliorer les choses ?

Le principal frein au développement du logement social est la mise à disposition du foncier. C’est de mon point de vue le principal frein à son développement. Dès que cet obstacle aura été levé la coopération entre les pouvoirs publics et les compagnies de construction pourra aller de l’avant. Le savoir-faire existe à Maurice. Il faut maintenant lever les obstacles, principalement administratifs.

Avec la pandémie de Covid-19 qui a plongé le pays dans la récession, êtes-vous optimiste avec l’ouverture des frontières ?

C’est une grave question car lorsque l’on voit le redémarrage de l’épidémie en Europe cela doit nous inciter à la prudence. Mais d’un autre côté, Maurice dépend beaucoup de l’activité touristique tant pour l’activité économique qu’elle génère mais aussi pour les devises qui entrent au pays. A court terme, le pays ne pourra pas réorienter son économie, il faut donc vite trouver une solution.

Actuellement les frontières sont pour moi toujours fermées car avec une quarantaine de 15 jours, qui voudrait venir à Maurice si ce ne sont les personnes qui y vivent ?

Faire repartir le tourisme nécessitera de prendre le risque de faire entrer le virus dans le pays. Mais avons-nous vraiment le choix ? Les aides du gouvernement servent d’amortisseur social mais jusqu‘à quand ?

Afin d’éviter la catastrophe économique et sociale, il faudra, sans doute, envisager une ouverture réelle des frontières avec un accompagnement adéquat : circuits réservés aux touristes, suivi médical plus serré des ‘frontliners’, utilisations des tests rapides sur les personnes arrivant à Maurice etc… Je suis sûr que les responsables du tourisme sont tous en train de travailler sur les mesures les plus appropriées. Mais il faut peut-être se préparer à devoir vivre avec le virus sans ‘lockdown’.

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