La liste des élus qui interviendront sur le Use of Pesticides Bill est en train d’être circulée. Bobby Hurreeram entend les journalistes dans la galerie de la presse s’étonner du nombre élevé d’orateurs pour ce débat. Ils sont 21 sur la liste. On prendra le maximum d’intervenants possible d’ici la pause du dîner de ce soir, assure-t-il.

Un peu plus de 5 minutes avant le début de la séance parlementaire du jour, Prem Koonjoo arrive dans l’hémicycle. Une enveloppe à la main, il marche vers son fauteuil avec sa bonhomie habituelle. Il est seul dans toute sa section  des travées. Il s’affaire. Mettant de l’ordre dans ses papiers. Pas très loin de là, Eddy Boissézon et Marie Claire Monty discutent sans se soucier de celui qui doit répondre à la Private Notice Question (PNQ) de ce 29 juin.

Adrien Duval et Guito Lepoigneur arrivent et tombent sur Ravi Rutnah, qui les a précédés. «Pa tret dimoun gopia zordi la», plaisante le député de Curepipe/Midlands en regardant l’élu de Piton/Rivière-du-Rempart (no 7). Les trois hommes discutent dans la bonne humeur. «From a sitting position», le mot peut être utilisé, plaisante Rutnah. Ce qui fait rigoler ses deux interlocuteurs. Les trois scrutent ensemble la liste des intervenants de ce soir. L’élu du Muvman Liberater doit prendre la parole. Entre deux éclats de rires, il demande aux deux bleus : «Ena happy hour zordi la?»

C’est à Thierry Henry que Rutnah fait désormais la conversation. Le voyant arriver, le député du no 7 prend de ses nouvelles : «To’nn bien prepare zordi la?», en faisant allusion à la PNQ du jour. «Parti kot mwa sa», sourit l’élu bleu en plaisantant à nouveau sur le mot «gopia». Une allusion aux propos de la Speaker durant l’examen en comité du Budget. Xavier Duval se mêle à la conversation. «‘Gopia’ nepli ‘unparliamentary’ aster. Gagn drwa servi sa mo la», plaisante-t-il. «When you are having a private conversation, yes», rétorque Rutnah.

A 15h02, la sonnerie retentit alors que les travées de la majorité et de l’opposition sont encore clairsemées par endroits.

De nombreux députés et ministres se hâtent pour regagner leur place. Mais ils sont coupés dans leur élan par l’hymne nationale qui démarre. Ils se figent, pour quelques-uns, à quelques mètres de leur place. Dès la dernière note de Glory to Thee, Dan Baboo pique un sprint pour regagner sa place. Arrivé en mode jogging à son fauteuil, le ministre du Sport, Stephan Toussaint est tout essoufflé.

La PNQ démarre. Prem Koonjoo déroule ses réponses et se prend à donner moult détails sur les barachois. Le leader de l’opposition demande l’intervention de la Speaker. Maya Hanoomanjee s’assure auprès du ministre qu’il répond bien aux questions posées. «Yes!» confirme Koonjoo. Paul Bérenger soupire : «Ça promet !»

Imperturbable, le ministre lit ses réponses en commettant parfois quelques fautes. L’ennui gagne donc les rangs de l’Assemblée nationale. Nando Bodha et Ivan Collendavelloo roupillent. Malgré toute sa bonne volonté d’écouter son voisin qui parle juste devant lui, Raj Dayal pique du nez.

Les premières 15 minutes assez monotones passées, Koonjoo en vient aux attaques de requin. Léthargiques jusqu’ici, les députés du PMSD se redressent, «hmmm», signale Xavier Duval, montrant son intérêt retrouvé. Le petit brouhaha conduit Koonjoo à ne plus regarder sa feuille pour s’intéresser aux travées des bleus. Il lâche un sourire sarcastique, ce qui fait bien rire les élus du PMSD.

Il est temps pour le chef de l’opposition de poser ses questions supplémentaires. Il questionne donc le ministre sur deux rapports dont le contenu contient des incongruités, selon lui. Mais le ministre semble ne pas en faire grand cas. Duval revient à la charge plusieurs fois et s’attire l’agacement d’Ivan Collendavelloo qui semble ne pas comprendre son insistance. «Have you read?» s’impatiente Duval, en montrant ses feuilles au Deputy Prime minister. Celui-ci regarde ailleurs.

Koonjoo déroule ses réponses, stoïque. A une autre interrogation de Duval, il fait même de l’esprit. «Rome was not built in one day». Bien réveillé ce coup-ci, Nando Bodha semble visiblement impressionné par le sens de la répartie de son collègue. Il pointe du doigt Koonjoo en regardant d’un air satisfait le front bench du gouvernement.

Sérieux, Duval insiste toujours, il veut savoir si Koonjoo a lu les rapports. Le ministre balaie en touche, expliquant que ceux-ci «are not meant for us». Le chef de l’opposition a du mal à rester sérieux et rigole du ton de la réponse de Koonjoo, les autres bleus aussi.

Duval passe et s’intéresse désormais au Fisheries Bill. Où en est-on avec ce projet de loi ? veut-il savoir. Koonjoo marque un temps d’arrêt avant de se préparer à répondre. Mais il est devancé par Ravi Rutnah et quelques autres députés de la majorité. «Soon, soon !» lâchent-ils. Le ministre suit le mouvement. «Soon, very soon», confirme-t-il.

C’est désormais à une autre rapport auquel s’intéresse le chef de l’opposition en se demandant ce qu’un des auteurs du rapport a effectué pendant deux jours. Pour la première fois, Koonjoo s’emporte : «I don’t know how many days he spent with you.» Loin d’irriter Duval, l’attitude du ministre lui fait perdre son sérieux.

La ferme aquacole de Mahébourg fait l’objet d’une nouvelle question de Duval qui veut savoir si un nombre important de poissons a pu quitter les cages. Le ministre botte en touche, l’affaire étant «in Court». Les députés bleus jouent aux perturbateurs : «In the foodcourt?» Les députés du MMM en rajoutent. «Plonge, plonge», suggèrent-ils à Koonjoo.

Duval ne lâche toutefois pas l’affaire, il veut savoir dans quelle cour l’affaire est entendue. «Court of justice!» déclare d’un air triomphal le ministre de l’Economie océanique. Les élus du gouvernement soutiennent bruyamment leur collègue avec un tap latab généralisé. Ceux de l’opposition cachent mal leur amusement. Mais le leader du PMSD veut avoir sa réponse.

Sauf qu’entre-temps, un peu déconnecté, Prem Koonjoo est affairé à mettre de l’ordre dans ses feuilles. Il finit toutefois par se rendre compte que Duval lui pose une question. Il lève la tête, regarde le leader de l’opposition et lui lance : «Go on!» Duval n’est pas d’humeur badin : «I’m waiting for your answer, you’re making jokes here. Which court ?» Koonjoo écoute d’une oreille un Duval agacé et récupère la note envoyée par ses fonctionnaires d’une main. «Investigation is still going on.»

Sir Anerood Jugnauth semble très amusé par cette réponse inattendue et regarde Maya Hanoomanjee en riant de bon cœur. Exaspéré, Duval finit néanmoins par sourire aussi. Pendant qu’Adrien Duval se résigne : «Perdi nou letan pou nanye

Après la ferme de Mahébourg, c’est celle que veut installer la société Growfish dans l’Ouest qui fait l’objet d’une question. Sauf que visiblement, Koonjoo ne semble pas comprendre le mot «Growfish». Duval se répète, en vain. Pour mieux se faire comprendre le leader de l’opposition mime un poisson obèse en écartant ses bras. Sans succès. «Sa osi li pa kone?» s’étonne le chef de l’opposition. «Abe ki li kone?» se demande Adrien Duval.

Xavier Duval repart à l’attaque… sur les attaques de requin. Il suggère de prendre des précautions et d’annuler le projet pour ne pas être confronté à la même situation qu’à La Réunion. Le ministre dit ne pas être au courant de la situation à l’île sœur par rapport aux attaques de requins, qu’il prononce « shorks ». Cette prononciation amuse au plus haut point les travées de l’opposition d’où fusent des «shorks», ce qui empêche le ministre de terminer sa réponse. Ce qui amène d’ailleurs à la fin de la demi-heure dédiée à la PNQ.

Pendant que les élus de la majorité frappent leurs pupitres, Shakeel Mohamed lance, dépité : «Al zer lekor kouma labwet do!» Adrien Duval surenchérit : «Enn bomli dan minis.» Pendant que le Premier ministre se lève pour présenter une motion, Adrien Duval lance à Koonjoo : «E minis bomli!» Celui-ci n’en a cure et continue de sourire.

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