En 1912, Frank Shuman expérimenta en Égypte la première centrale solaire à concentration. Cette innovation fut acclamée comme un tournant possible dans l’utilisation des énergies. Mais la Grande Guerre intervint et l’âge de l’or noir survint.

Plus d’un siècle après, les investisseurs se retirent aujourd’hui de nombreux projets qui auraient fait du Maghreb et du Moyen-Orient la source d’une électricité verte à partir de la même technologie que proposait Shuman, quoique significativement améliorée en efficacité. Elle aurait alimenté, au nord, l’Europe et, au sud, l’Afrique subsaharienne en cruel besoin énergétique. Encore une fois, la géopolitique et les enjeux économiques ont pris le dessus.

Pourtant, le monde a connu bien de transitions énergétiques. Cependant, toutes se sont prolongées sur plusieurs décennies. Toutefois, celle que nous devons amorcer, l’âge des énergies solaires durables, se fait attendre. Avec l’épuisement des ressources fossiles et la menace du changement climatique, les énergies durables qui nous proviennent, directement ou indirectement, du soleil auraient dû s’imposer depuis longtemps, allant de la photovoltaïque aux bioénergies en passant par l’hydro et l’éolienne.

À Maurice, également, notre transition énergétique est un difficile processus. Le rapport de la National Energy Commission datant de 2013, soutenue par 56 soumissions de différentes parties concernées et du public, aurait dû être rigoureusement appliqué. Mais il n’y a toujours pas d’instance régulatrice dans ce secteur au moment où on doit se demander ce qui reste de « smart » des nouvelles villes ou nouveaux projets où les synergies entre énergies propres, efficacité énergétique et réseaux intelligents ne sont pas optimisées. La ratification de l’accord de Paris, ici comme ailleurs, cache mal l’échec des politiques énergétiques.

Pourrait-il en être autrement ? Nous évoluons toujours à l’intérieur d’un système où des énergies se dégradent, créant un désordre perpétuel. Même si les énergies sont conservées en quantité, avec chaque transformation d’une forme à une autre, par exemple lorsque l’électricité est produite à partir du charbon, le chaos de l’univers augmente. Pour ce qui est des renouvelables, les réservoirs que sont le soleil et l’espace sont si immenses que le désordre créé est négligeable lorsque nous puisons notre énergie du soleil.

Par contre, l’utilisation des énergies fossiles provoque une accumulation du désordre dans les matières produites et les déchets. Donc, c’est à l’intérieur de notre système que le désordre s’accroît. Et la théorie de l’information nous montre que la complexité se perd aussi avec le désordre, évoluant vers des niveaux de moins en moins intelligents. Un exemple : les longues chaînes de molécules que constitue le charbon ou le pétrole en brûlant finissent en des formes simples comme le dioxyde de carbone et de la vapeur d’eau. Et avec, une énergie de pauvre qualité, la chaleur est dissipée dans l’atmosphère. C’est le contraire de la photosynthèse, source de vie, de biodiversité même.

Une analogie est possible lorsqu’on réfléchit au désordre de nos politiques qui favorisent les activités les plus « primaires » comme l’utilisation des combustibles fossiles. Elles sont créatrices de chaos et de résidus qui renferment peu de « valeur » en guise de complexité. Autrement dit, des déchets, de la pollution, de la chaleur… les causes principales de déséquilibres comme le changement climatique. L’analogie se situe au niveau de la simplification de l’intelligence de nos politiques qui passe d’un ordre fonctionnel élevé marqué par une capacité d’innover, d’anticiper et de trouver des solutions complexes, aux automatismes « primaires » d’un cerveau reptilien.

L’ordre ne peut venir que d’un système supérieur externe. Le recours aux énergies solaires durables est la solution pour notre planète. Et si nous poussons l’analogie aux politiques, il faut une éthique invoquant les valeurs les plus nobles de la pensée humaine. Certains parleront d’un impératif morale, voire d’une lumière qui émane de notre « esprit ».

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