Il ne faut quand même pas prétendre que le MSM envisage réellement la possibilité de présenter un candidat pour la partielle du 17 décembre. Pravind Jugnauth et les siens ont, certes, une certaine propension à s’attirer une poisse invraisemblable. Mais ils ne sont ni suicidaires, ni masochistes au point de s’infliger une défaite moralement humiliante et politiquement catastrophique. A défaut des drapeaux orange flottant le jour du dépouillement, la bannière des vainqueurs de Belle-Rose/Quatre-Bornes (no 18) cachera une petite histoire…

Roshi Bhadain. Il a très peu apprécié que nous écrivions que sa défaite est presque programmée. Imbu de sa personne et persuadé que ses calculs et son analyse du comportement électoral sont justes, l’ancien pote de Pravind Jugnauth estime que sa personnalité, son propos et son Reform Party ont déjà eu une incidence profonde sur le pays et plus précisément sur les électeurs du no 18.

Une victoire de Bhadain nous paraît toujours aussi invraisemblable. Toutefois, admettons que le leader du Reform Party triomphe. Et peu importe si c’est avec moins de 25% des suffrages, soit plus de la moitié des 17 527 votes qu’il avait recueillis en décembre 2014. Cette victoire, si elle a lieu, signalera la transformation d’un simple précédent – celui de décembre 2014 – en une jurisprudence nouvelle. Dénotant un nouveau comportement des électeurs devenus enfin capables de bouder les partis mainstream comme lors d’une partielle à Pamplemousses/Triolet (no 5) en 1970. Mais l’espoir, dit-on, fait vivre les…

Arvin Boolell. On n’a pas suffisamment mesuré la clarté avec laquelle le candidat travailliste s’est exprimé, le 4 août dernier en direct sur ION News. Jusqu’ici habitué à donner l’image d’un lieutenant (trop) conciliant, l’ancien ministre travailliste a affirmé que peu importe le résultat de la partielle, il sera candidat au leadership du Parti travailliste.

La victoire de Boolell, servant de stimulant pour les rouges, sera avant tout un succès personnel du candidat. Car même si le gouvernement enchaîne gaffes, bévues et scandales, les mécontents ne semblent toujours pas s’être résolument rangés derrière Navin Ramgoolam. C’est d’ailleurs à se demander si la présence répétée de celui-ci durant la campagne rendra effectivement service à Boolell.

Objectivement, si la victoire est importante pour le leader des rouges, elle ne sera pas suffisante, à elle seule, pour effacer les images et les comportements qui sont associés à Ramgoolam. Légitimant ainsi la volonté de Boolell de tourner la page du leadership actuel. Contraignant, au passage le chef des rouges à devoir défendre son poste pour la première fois depuis son arrivée à la tête du PTr en 1991.

Dhanesh Maraye. Le candidat du PMSD est, certes, l’exemple du bon garçon de bonne famille qu’on aligne pour plaire à l’électorat «éclairé» du no 18. Mais il faut bien avouer que le bleu timide est surtout porté par l’assise de son parti et de son leader dans la circonscription. De sorte qu’une victoire de Maraye ne sera, après tout, que celle de Xavier Duval. Et on comprend exactement à quoi elle servira.

Adrien Duval l’a dit sur ION News jeudi, Mahmad Kodabaccus l’a répété samedi : Xavier Duval se positionne pour être le futur Premier ministre du pays. Une victoire, le 17 décembre, ne va toutefois pas conduire Duval à aligner 60 candidats aux prochaines législatives En fait, le succès des bleus permettra à leur leader d’être à Navin Ramgoolam, ce que Paul Bérenger a été à sir Anerood Jugnauth en 2000. C’est-à-dire un allié ayant vocation à partager le primeministership pendant une partie du mandat d’un gouvernement. Une stratégie qui ne manque pas de sens au moment où Ramgoolam doit démontrer que réélu, il ne compte pas régner pendant une nouvelle décennie.

Nita Juddoo. La jeune candidate du MMM est dans la même situation que Dhanesh Maraye. Là où Duval a fait le pari du jeune professionnel bien sous tous rapports, Paul Bérenger a effectué le même calcul en y ajoutant l’élément féminin. De même, là où Duval entend capitaliser sur une victoire pour discuter en position de force avec Navin Ramgoolam, Bérenger – malgré ses dénégations devenues un rituel hebdomadaire – veut amener un Pravind Jugnauth plus conciliant à la table des négociations.

La victoire de la candidate mauve ne servira, au final, qu’à redorer le blason de Bérenger auprès de ses troupes. Juddoo ayant été son choix gagnant, envers et contre tous, le patron des mauves, n’aura aucune difficulté à aller expliquer que le prochain move payant est de s’allier avec le Premier ministre actuel.

On pourra alors compter sur Bérenger pour expliquer qu’il a conseillé à Jugnauth de demander à Yerrigadoo de se retirer comme Attorney General. Tout en jurant – comme il l’a fait en 2014 – que son alliance implique un nettoyage au javel des écuries du MSM. Après 17 ans sans victoire électorale majeure, Bérenger ne manquera pas d’assurer ses troupes que «plus que jamais», l’avenir du MMM est brillant… aux côtés du MSM.

Et quid du MSM ? Dans l’idéal, Pravind Jugnauth et ses troupes souhaitent probablement voir Kugan Parapen ou Jack Bizlall gagner la partielle. Ce scénario étant irréaliste, le MSM se contenterait bien d’une victoire sans grand éclat du MMM. Espérant que cela serve les intérêts du parti au pouvoir à moyen terme avec un Bérenger moins exigeant lors des négociations.

Si Pravind Jugnauth avait brandi le drapeau des rouges lors de son élection à la partielle de Moka/Quartier-Militaire en mars 2009, il ne faudra toutefois pas compter sur Nita Juddoo pour en faire de même avec l’étendard du MSM, si elle gagne le 18 décembre. Candidate aux prochaines élections générales, elle sera alors bien obligée de le faire lors de la campagne de l’alliance Jugnauth-Bérenger !

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