Au fil des mois, Navin Ramgoolam a posé la même question à ses interlocuteurs : « Et si je ne fais pas d’alliance avec Bérenger, qu’est-ce qu’il se passera ? » Les réalistes lui ont cyniquement répondu qu’un des deux scénarios suivant se réalisera alors. Le leader du MMM conclura un Re-Remake 2000. Ou alors, Ramgoolam tentera une réédition de l’alliance de l’avenir de 2010. Le temps faisant son œuvre, l’un des deux scénarios deviendrait tout à fait réalisable à mi-2015.

En dehors de toute réforme électorale, notre système politique aurait forcé les leaders à conclure une alliance afin d’espérer remporter les élections. Dépendant de leur choix, Navin Ramgoolam et Paul Bérenger s’exposeraient alors à subir les inconvénients de leurs décisions ou non-décisions respectives.

Pour l’actuel Premier ministre, une nouvelle collaboration avec le MSM aurait été teintée de méfiance. De plus, le nouveau bleu-blanc-rouge ne garantirait pas non plus une victoire éclatante à Ramgoolam. Ouvrant ainsi la voix à une cassure, voire à la recomposition d’un gouvernement mauve-blanc à mi-mandat.

Pour Bérenger, la perspective de devoir travailler cinq ans avec un Pravind Jugnauth pour lequel il n’a ni respect ni sympathie aurait été un supplice. D’autant plus qu’en cas de victoire, le leader des mauves jouerait alors un rôle actif dans la mise en orbite de son numéro deux. Afin de le faire devenir un premier ministrable en puissance à l’horizon 2020.

A bien y voir, l’alliance PTr-MMM est en fait la solution du moindre mal pour le tandem Ramgoolam-Bérenger. Leur « chemistry » étant déjà quasi-légendaire, il ne resterait plus qu’à éviter les erreurs de leur première cohabitation de 1995. Ramgoolam l’avoue volontiers, leurs styles sont certes « différents » mais demeurent néanmoins « complémentaires ».

Il fallait donc trouver la formule pour faire cohabiter les deux styles. Ramgoolam et Bérenger jurent que l’alliance PTr-MMM n’est pas qu’un arrangement pour réaliser les ambitions personnelles de l’un et de l’autre. C’est peut-être vrai. Mais il n’en demeure pas moins que pour des raisons politiques et partisanes, chacun a dû négocier assidûment afin que l’un maintienne les apparences d’un primeministership toujours fort tandis que l’autre accède à une présidence désormais en mesure d’influer concrètement sur les décisions du gouvernement.

C’était écrit que l’option PTr-MMM était le meilleur deal auquel pouvaient aspirer Ramgoolam et Bérenger et, par extension, leurs partis respectifs. C’est aussi écrit que le style respectif des deux leaders causera quelques étincelles [voire des blocages]  à l’avenir. En 1996 et 1997, ce sont les querelles d’ego [et déjà de prérogatives] qui avaient conduit à l’éclatement de l’alliance PTr-MMM d’alors. Un « incident de parcours », s’en désole encore aujourd’hui Bérenger.
Reste donc la seule vraie question. Presque 20 ans après leur premier mandat commun, et au moment d’entamer ce qui pourrait être le dernier mandat au pouvoir de Bérenger et Ramgoolam, les deux hommes ont-ils suffisamment mûri ? Au point de ne pas commettre, cette fois-ci, des erreurs de fin de parcours susceptibles de conduire au même résultat qu’en 1997 ?

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