Le gouvernement met en place un plan national de désamiantage de maisons. C’est ce qu’a indiqué, dans un communiqué, le ministère du Logement et des Terres. Les structures concernées sont des maisons de type EDC/ex-CHA, construites dans les années 60. Le ministère, dans une étude récente, en a recensé 2 137 dans 59 régions de l’île. Le ministre des Finances « déboursera le budget nécessaire », poursuit le communiqué.

Cette décision a été prise lors d’une réunion, hier, entre Vishnu Lutchmeenaraidoo et son collègue du Logement et des Terres, Showkutally Soodhun. Dev Manraj était également présent lors de cette rencontre. « Pour la bonne marche de ce projet, un comité national a été mis sur pied », indique le ministère du Logement. Celui-ci devrait tenir sa première réunion la semaine prochaine.

Des officiers des ministères de la Santé, de l’Environnement, des Finances et des Infrastructures publiques y siégeront. Au côté d’ONG et d’associations. Le ministère du Logement lance d’ailleurs un appel à ces dernières afin qu’elles soumettent leurs propositions par écrit ou se manifestent pour faire partie du comité.

Mesures insuffisantes jusqu’ici

Pour les membres de la société civile ayant lutté de longue date pour le désamiantage, la mise sur pied de ce plan national est accueillie favorablement, voire avec soulagement. « On attend cela depuis longtemps », affirme Jasmine Toulouse. La jeune femme habite l’ouest de l’île et a elle-même vécu dans une maison amiantée. « Nous avons justement eu une réunion, il y a quelques semaines, au niveau des cités de Rivière-Noire, avec des officiers de la UNDP et du ministère du Logement », dit-elle. L’occasion de faire valoir que les mesures mises en place jusqu’ici n’étaient pas suffisantes.

Certes, des facilités d’emprunts et des grants existent, poursuit-elle. Mais la plupart des gens qui habitent encore ces maisons sont de revenus modestes, explique-t-elle, et n’ont pas les moyens d’entreprendre tous les travaux nécessaires. « J’avais donc proposé, lors de cette rencontre, que le ministère se charge du désamiantage. » Ce qui implique, en général, de raser la maison puisque les murs sont faits entièrement de plaques de fibrociment comprenant de l’amiante. « Mais aussi qu’il assure la construction de la nouvelle maison. Le résident pourrait, par la suite, s’acquitter du paiement mensuellement jusqu’à devenir propriétaire. »

Comment se débarrasser des plaques

Une solution à laquelle souscrit également Devianand Narrain, de Rezistans ek Alternativ. Celui-ci a été actif, aux côtés d’autres, lorsqu’on s’est rendu compte, dans les années 90, que l’amiante est cancérigène et pose donc un véritable risque sanitaire. « Nous avons toujours milité pour que l’Etat prenne en charge les travaux de démolition et de construction », soutient-il. « Et que les nouvelles maisons soient proposées à des prix abordables aux habitants. »

C’est le gouvernement, rappelle-t-il, qui dans les années 60 a fait ériger ces maisons. Les fibres d’amiante – car il s’agit d’un groupe de minéraux fibreux naturels – sont, à l’époque, populaires dans le secteur de la construction. Si on ne connaissait pas encore leurs propriétés hautement cancérigènes, elles sont toutefois appréciées « en raison de leur extraordinaire résistance à la traction, de leur mauvaise conduction de la chaleur et de leur résistance relative aux attaques chimiques ».

S’il salue la mise en place du plan de désamiantage, Devianand Narrain s’interroge toutefois sur le calendrier de travail du comité national. « C’est une question urgente, de santé publique, qui concernent à la fois les résidents de ces maisons mais aussi leur voisinage », insiste-t-il. « Or, nous savons comment fonctionnent les comités, et qu’ils peuvent traîner en longueur. Il ne faudrait pas que celui-ci tarde à soumettre ces recommandations. »

Autres « priorités » à considérer : le relogement temporaire des habitants le temps des travaux, et « l’élimination des déchets contenant de l’amiante, qui ne peuvent être jetés n’importe où », souligne Devianand Narrain. Certains habitants de l’Ouest racontent ainsi que lorsqu’ils ont contacté le District Council pour s’enquérir sur le dispositif mis en place pour se débarrasser des plaques d’amiante, ils ont été livrés à eux-mêmes. Ce matériau a finalement atterri dans les soubassements de leur nouvelle maison…

Le secteur privé ‘on board’ ?

La Confédération des travailleurs du secteur privé (CTSP) se dit « satisfaite » des « déclarations positives » de ce gouvernement au sujet de l’amiante, citant la dotation budgétaire pour le désamiantage de l’hôpital Victoria. « Zot pe montre ki zot ‘committed’ », affirme Reeaz Chuttoo. « Le secteur privé peut également être partie prenante de ce plan national », avance le porte-parole de la CTSP. Celle-ci, rappelle-t-il, a été parmi les premiers à s’élever contre l’amiante.

« Nous avons évoqué la question de l’amiante dans les maisons EDC avec le ministre Soodhun il y a quelques semaines », poursuit Reeaz Chuttoo. De même que la possibilité que les entreprises participent aux efforts de désamiantage à travers le programme de Corporate Social Responsibility.

Le porte-parole indique également avoir une rencontre avec le ministre de la Santé Anil Gayan ce vendredi 24 juillet. La CTSP formulera alors une requête pour que l’amiante soit remise sur la liste des produits interdits d’importation sous les Consumer Protection (Control of Imports) Regulations (1999). Les fibres d’amiante restent toutefois interdites sous la Dangerous Chemicals Controls Act (2004).

« L’amiante a été utilisée dans des milliers de produits pour un grand nombre d’applications, comme les bardeaux de toiture, les canalisations d’eau, les couvertures anti-feu, les produits de remplissage en plastique, les emballages médicaux, ainsi que pour les garnitures de disques d’embrayage et de freins, les joints d’étanchéité statique et les plaquettes des automobiles. » (Source : LaPresse.ca)

Photo (Maria Varipati / www.trekearth.com) : Derrière la façade de carte postale de Rivière-Noire se trouvent des maisons amiantées dans lesquelles vivent encore des familles.

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