Répondant à la plaidoirie de Clare Montgomery, David Perry a argumenté autour de la «recklessness» de Pravind Jugnauth. Prenant un exemple théorique, le Queen’s Counsel (QC) a estimé qu’un «public official» ne peut se dégager de sa responsabilité en «arrosant ses proches de contrats publics pour ensuite dire qu’il ne savait pas». L’avocat ironise que seule une «extraordinary Prevention of Corruption Act» (PoCA) permettrait une telle possibilité.
Perry développe en précisant que la PoCA contourne la difficulté habituelle des lois pénales par rapport aux éléments de preuve. En prévoyant des facteurs différents pour le délit de conflit d’intérêts. S’il n’était pas ainsi, insiste le QC, cette loi serait une «lettre morte».
Si Clare Montgomery dissocie le fonctionnement des articles 13(1) et 13(2) de la loi anticorruption, Perry affirme que ces deux dispositions fonctionnent en tandem. Cet argument de l’avocat interpelle un des law lords. «The relative provides the connection. The interest then becomes personal to the decision maker», questionne lord Brian Kerr.
L’avocat du Directeur des poursuites publiques acquiesce et élabore. Pourquoi l’article 13(1) ferait-il obligation à un «public official» de déclarer ses intérêts pour ensuite lui permettre de prendre des décisions administratives y relatives sans tomber sous le coup de l’article 13(2). Le législateur à Maurice «did not intend incoherence», avance le QC. Affirmant, au contraire, que ces deux articles ont pour but de «hold into account» efficacement les personnes visées.
Perry aborde alors la question de l’intention, le mens rea. Pour l’avocat, la règle est «crisp, simple and exclusionary» : il y a une ligne à ne pas dépasser et Pravind Jugnauth l’a fait, accuse-t-il. Pour cela, il s’appuie sur la décision de la Cour intermédiaire. En rappelant que c’est cette instance qui a examiné les faits relatifs aux décisions prises par Pravind Jugnauth alors que la Cour suprême a uniquement effectué un raisonnement en droit.
«L’accusé a menti», assène Perry en relevant que Pravind Jugnauth avait dit n’avoir pas vu un procès-verbal faisant état de la nécessité de régler la somme due aux propriétaires de Medpoint de manière urgente avant la fin de l’année fiscale 2010. «Once his credibility is gone, that is generally relevant to his state of mind to the rest of it», poursuit le QC.
Là se trouve un des «ingredients of the offence», précise l’avocat. Qui rappelle que la notion de «recklessness» n’est rien d’autre que la «subjective awareness» du «public official». Le QC estime donc que la décision de la Cour intermédiaire est «cohérente et compréhensible». Résumant sa pensée, il explique : «Once you know she [sa sœur] is a shareholder, you are reckless because you are running the risk that you may be acting where there is a personal interest.»
«Allow the appeal, reinstate the conviction and remit the matter to the court in Mauritius for sentencing to take place», a conclu le QC. Avant que Lord Kerr n’explique que le Privy Council va «reflect very carefully» et prendre le temps qu’il faut avant de donner sa décision.
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Partie 2 : Clare Montgomery, QC, présente les arguments de la défense de Pravind Jugnauth. Contre-argument de David Perry.
Partie 1 : David Perry, QC, présente les arguments du Directeur des poursuites publiques.
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