Ce projet de loi ne vient pas dire que « devenir riche est un péché ». Le Premier ministre a insisté sur ce point à l’ouverture des débats sur l’amendement constitutionnel qui doit être voté aujourd’hui. « Nous avons un mandat clair », a soutenu sir Anerood Jugnauth (SAJ). Et ce gouvernement fera tout pour débarrasser ce pays des abus en tous genres, ce « cancer à la base de nombre de nos maux ».

La confiscation des biens est un outil important et surtout efficace dans la lutte contre le crime organisé, a expliqué le Premier ministre en s’appuyant sur l’exemple de l’Irlande. On s’attaque à leur appât du gain, poursuit-il, en les empêchant de profiter de leurs biens mal acquis.

Le concept de confiscation n’est, du reste, pas nouveau dans notre législation puisque la Prevention of Corruption Act en fait mention, explique SAJ. Le gouvernement, affirme-t-il avec force, veillera à ce que cette loi passe le test de constitutionnalité.

Le ministre Bhadain a encouragé une approche participative dans le cadre des débats sur ces lois, a salué le Premier ministre, qui déplore toutefois le « sinister agenda » de certains. Des clarifications ont été données, des amendements apportés, dit-il. « L’opposition, quand le moment viendra, assumera je l’espère ses responsabilités », a conclu le Premier ministre.

Le vrai test

Paul Bérenger l’avait dit hier : le MMM se prononce en faveur de l’amendement constitutionnel. D’autant que le Premier ministre a accepté d’inclure les « garde-fous » suggérés par les mauves. Le leader du parti du cœur l’a répété dans l’hémicycle aujourd’hui. Tout comme il a rappelé que son parti « a toujours été à l’avant-garde du combat contre la fraude, la corruption et le blanchiment d’argent ». Bérenger a d’ailleurs été chaudement applaudi par la majorité à la fin de son intervention.

Reprenant les propos de SAJ, un peu plus tôt, il souligne qu’il est nécessaire de s’attaquer aux poches des criminels, là où cela fera mal. D’autant, poursuit le leader de l’opposition, que les systèmes que mettent en place ceux à la fortune douteuse deviennent « plus complexes ».

Bérenger note toutefois que peu de pays ont adopté cette approche de confiscation des biens. Les exemples de l’Irlande, et de l’Australie en particulier, le confortent dans l’idée que celle-ci doit se faire dans le strict respect des lois et des droits. En Australie, des contestations en Cour ont eu pour résultat que le lien entre les crimes commis par la personne et les biens qu’elle possède doit être établi pour que ceux-ci puissent être saisis.

S’il a dit qu’il ne mentionnerait le Good Governance and Integrity Reporting Bill qu’en passant, Paul Bérenger y a toutefois consacré une bonne partie de son intervention. Le leader de l’opposition a ainsi réitéré que le MMM est « loin d’être pleinement satisfait » des dispositions du projet de loi. Bien qu’il salue les « progrès » accomplis, notamment vis-à-vis de l’amendement constitutionnel – essentiel pour que le GGIR puisse être appliqué – et de la possibilité de se référer à un juge si une personne qui fait l’objet d’une enquête par l’IRSA ne coopère pas.

Au lieu d’une « multiplication de nos institutions », il faudrait consolider et amender les lois existantes. Mais pour Paul Bérenger, le « vrai test » viendra avec la nouvelle Declaration of Assets Act qui, il l’espère, comprendra des « peines d’emprisonnement », mais aussi avec le projet de loi sur le financement politique.

Le vote sur le projet de loi GGIR devrait être renvoyé, a martelé Bérenger. Cela afin que chacun ait le temps d’étudier toutes les propositions soumises, notamment celles du Bar Council reçues cette semaine. Mais aussi afin de dégager « un large consensus, voire une unanimité » sur ce projet de loi.

Le leader de l’opposition a appelé le PMSD et l’Organisation du peuple rodriguais (OPR) à assumer leurs responsabilités.

‘Mollo mollo’

C’est justement un député du parti de Rodrigues qui a pris la parole après le leader du MMM. « Nous savons très bien quelle est notre responsabilité », a affirmé d’emblée Francisco François. « Le silence est une parole », a-t-il lancé à ceux qui, dit-il, l’ont critiqué ainsi que son camarade de parti pour s’être tus, ces dernières semaines, sur le GGIR et l’amendement constitutionnel.

Des décisions au niveau de juridictions européennes et de la Cour d’Ontario, poursuit le député, démontrent que la confiscation civile ne va pas à l’encontre des droits civils des personnes qu’elle vise. « Pou bizin met lors avek bann rekin ki krwar zot kapav fer seki zot anvi. »

Le Parliamentary Private Secretary avance que cet amendement constitutionnel est un outil « puissant et vital ». Et que ceux qui ont amassé leur fortune légalement n’ont rien à craindre. Il faut agir maintenant, soutient Francisco François. Mais « est-ce agir avec fermeté ou en mode ‘mollo mollo’ ? » s’est-il interrogé. Avant de conclure : « Je soutiens ce projet de loi. »

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