La galerie publique est remplie à ras bord par les collégiens qui vont participer au National Youth Parliament à partir de ce 2 août. Pendant quelques minutes, Etienne Sinatambou va faire la causette à quelques-uns des parlementaires en herbe pour leur prodiguer des conseils. Entre-temps, les policiers leur donnent à chacun une copie des questions parlementaires du jour.

Shakeel Mohamed arrive et jette nonchalamment son sac sur son fauteuil et file illico discuter avec Reza Uteem. Les deux semblent de bonne humeur, la conversation est animée.

Nando Bodha est également d’humeur taquine. Showkutally Soodhun en fait les frais. «Eh Showkut», dit le ministre des Infrastructures publiques au président du MSM. «Li pe anvi al Larabi saoudit», rigole Bodha, en montrant Soodesh Callichurn de la main. Soodhun esquisse un sourire gêné.

Ivan Collendavelloo est, lui, bien moins décontracté. Sir Anerood Jugnauth (SAJ) et le deputy Prime minister parlent de Thierry Henry. Le ministre mentor s’emporte : «Linn touy dimounn.» Pas encore arrivés à leurs places, les députés du PMSD ne sont pas là pour lui donner la réplique.

De sa place, Soodhun se joint à la conversation. Pour être une nouvelle fois raillé. «Get sa, mwa mo pa bizin nanye. Zis donn mwa enn tit Sheikh», plaisante le ministre mentor. L’ambassadeur manqué de l’Arabie saoudite lâche un rire quelque peu forcé.

Xavier Duval et Pravind Jugnauth arrivent dans l’hémicycle à deux minutes d’intervalle. Bobby Hurreeram fait, lui, son entrée à la dernière minute. En arborant un air inhabituellement solennel. La sonnerie retentit et on passe à la nomination du Deputy Speaker, poste vacant depuis la démission de Sanjeev Teeluckdharry. Le Premier ministre propose Hurreeram, la motion est immédiatement soutenue par Collendavelloo. Paul Bérenger ne cache pas son mécontentement au sujet de cette proposition.

Shakeel Mohamed se lève à son tour, proposant son camarade de parti Ritesh Ramful pour le poste. Xavier Duval soutient la motion du chef de file des travaillistes au Parlement. «Hmm, enn mari lalians sa!» remarque Mahen Jhugroo.

Les députés devant passer au vote, Maya Hanoomanjee suspend la séance pour qu’on prépare le scrutin. A peine la Speaker partie, le leader du MMM se tourne vers Mohamed. «To bizin fer enn point of order. Dir Alan [Ganoo] pa la.» Le conseil n’est pas accueilli avec grand enthousiasme par le député rouge. «Li osi li bizin vote», insiste Bérenger.

La suspension de séance amène les uns et les autres à charrier Hurreeram. Bashir Jahangeer s’y met, Adrien Duval s’en mêle. «Eh Bashir, marday bann la! Personn pa pou kone», dit-il au député du MSM en l’encourageant à mettre sa croix à côté du nom de Ramful. Patrice Armance chambre directement le futur Deputy Speaker : «Bobby, to pa pou kapav fer konferans de pres aster. Sa pou mank twa!»

Paul Bérenger regarde ailleurs. Il cherche Sudhir Sesungkur. Celui qui fait l’objet de la Private Notice Question (PNQ) du jour est absent, tout comme Roubina Jadoo-Jaunbocus et Sanjeev Teeluckdharry. Shakeel Mohamed est, lui, en campagne. Debout derrière les travées de l’opposition, il demande à Bashir Jahangeer de le rejoindre, mais le député de Rivière des Anguilles/Souillac ne bouge pas. Deux minutes plus tard, cette fois en compagnie d’Aadil Ameer Meeah, le député rouge demande à Soodhun de les rejoindre. Celui-ci les boude également.

Pris par l’affaire Bal Kouler, actuellement entendue devant la Cour intermédiaire, Raj Dayal et celui qui le défend – Ravi Rutnah – arrivent dans l’hémicycle. L’actuel deputy Chief Whip est accueilli par des plaisanteries. «Ravi !? Tonn vini! Dan ki fim to akter ?» harangue Salim Abbas Mamode. Mahen Jhugroo ajuste le nœud papillon du député de Piton/Rivière-du-Rempart (no 7) : «Linn mett so ti mimi tou.» Rutnah finit par répondre à la plaisanterie du député du PMSD : «Dan tou fim», sourit-il.

A 12h11, la sonnerie retentit à nouveau, les bulletins ayant été préparés, on doit désormais passer au vote. Pendant que la Speaker donne ses instructions, Sandhya Boygah, ayant mis son smartphone en mode selfie, vérifie son maquillage.

On vote et on plaisante. «Vinn asiz dans plas Chief Whip, pa twa ki pe gagn sa post la?» demande Adrien Duval à Ravi Rutnah. Celui-ci ne pipe mot. «Rutnah, to pou fer counting la?» suggère une autre voix des travées de l’opposition.

Les appariteurs passent récupérer le bulletin de chacun des députés. Tour à tour, ces derniers glissent leurs bulletins dans la petite urne transparente. Ivan Collendavelloo joue, lui, la prudence. Avant de glisser son bulletin, il le rouvre et vérifie soigneusement si sa croix est au bon endroit. Ce qui amuse les députés de l’opposition. Et le Premier ministre aussi. «Li pe cheke la!» rigole Pravind Jugnauth.

Quelques minutes plus tard, le dépouillement effectué, Hurreeram est élu avec 39 voix, contre 21 pour son adversaire. «San marday sa, in!», rigole le chef du MMM en commentant le score de l’opposition. La PNQ du jour peut débuter.

Si les échanges entre Xavier Duval et Pravind Jugnauth sont tendus, un commentaire du Premier ministre sur l’accident fatal de Thierry Henry met le feu aux poudres. Aurore Perraud réagit au quart de tour. «Li pa ti minis», lance-t-elle en continuant à interrompre le chef du gouvernement.

Thierry Henry veut aussi se mettre de la partie, mais le leader de l’opposition demande à ses troupes de se calmer. «Wait, I have the answer», assure-t-il. Jugnauth enfonce le clou, rappelant que Henry était resté en poste, en tant que Parliamentary Private Secretary, après l’accident. «Demann to papa ki Xavier ti propoze», proteste Perraud. Mais le Premier ministre ne cède pas. «Demann to papa», insiste Thierry Henry. «Anerood, to papa ti defann sa», accuse aussi Bérenger.

Le ministre mentor donne de la voix : «It’s a big lie», crie-t-il, avant de traiter Xavier Duval de «liar». Le commentaire fait bondir de colère le leader de l’opposition. Amenant la Speaker à demander à SAJ de retirer son propos. Celui-ci n’obtempère qu’à moitié, ce qui agace à nouveau Duval.

Voyant la situation s’envenimer, c’est vers Ravi Rutnah que Paul Bérenger se tourne. «Tintin, vini», nargue-t-il en suggérant au député d’aller prêter main forte à Maya Hanoomanjee. Dans la cohue, SAJ se lâche à nouveau. «I have already withdrawn, shut your bloody mouth», enrage-t-il.

Les choses se calment quelque peu. Amenant SAJ à retirer son propos de manière inconditionnelle, Duval en fait de même, car il a aussi, dans la mêlée, traité le ministre mentor de menteur. La situation amuse Bérenger mais pas Pravind Jugnauth. Qui regarde en direction du leader du MMM avec sévérité : «To riye kouma enn gopia!»

Shakeel Mohamed pose une question supplémentaire, s’étonnant du traitement différent en matière de démissions. Ils ont choisi de se retirer volontairement, dit Pravind Jugnauth. Le chef du gouvernement précise, dans la foulée, ne pas avoir peur d’une partielle. La fanfaronnade de Jugnauth est accueillie par les tap latab de ses troupes. Soodhun ne se joint pas aux réjouissances. Du coin de l’œil, il regarde son leader d’un air défait.

Le temps imparti à la PNQ se termine et Maya Hanoomanjee se retire. Car une des questions au Premier ministre concerne Landscope, que dirige une de ses filles. Pendant que la Speaker quitte le perchoir, Bobby Hurreeram va y prendre place pour la première fois. La solennité du moment est rompue par Rajesh Bhagwan. «Pa vinn order mwa out la, in» se moque-t-il. «No gestures please», renchérit son leader.

L’échange sur le traitement salarial de Naila Hanoomanjee se déroule dans le calme. Malgré un petit coup de chaud entre Bhagwan et Sinatambou. «To latet kouma dir biskwi Marie», se moque le député de Beau-Bassin/Petite-Rivière. La première partie des travaux parlementaires de ce 31 juillet se concluent dans une atmosphère bon enfant.

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