Suite à la récente publication du rapport de l’Observatoire des Drogues, PILS souhaite apporter certaines clarifications sur son contenu et le processus autour du lancement de ce dernier.

La création de cet observatoire est certainement un pas en avant, et nous trouvons la participation de la société civile sur ce comité louable. Cependant, nous ne cautionnons pas tous ce qui est dit dans ce rapport, le processus de validation n’ayant pas été totalement démocratique et transparent. A aucun moment, le rapport final n’a été distribué aux associations pour une analyse approfondie et validation interne avant le lancement.

De plus, le déni autour de la question des décès lies aux drogues de synthèse nous interpelle. Ce document se cantonne principalement au rapport des certificats de décès, sans analyser d’avantage le contexte de ces morts par overdose. Des investigations plus poussées ont-elles eu lieu pour pouvoir ainsi affirmer qu’il n’y a pas de cause à effet ? Ce type d’analyse est fondamental afin de mieux saisir l’impact des drogues synthétiques chez nous. Ainsi, les annonces répétées à l’effet que la situation n’est pas alarmante nous interpellent. Au-delà du nombre controversé de morts, les admissions en milieu hospitalier due à la consommation de drogues synthétiques ont augmenté de 188% proportionnellement cette année comparé à l’année dernière.

Nous notons aussi que ce rapport ne fait aucune interprétation de la hausse du taux d’incidence au VIH chez les injecteurs de drogue en 2015. Aucune mention n’est faite non plus de l’arrêt de l’induction au programme de méthadone, malgré le fait que ce traitement soit sur la liste des médicaments essentiels de l’Organisation mondiale de la santé. Concernant l’hépatite C, nous savons que 97% des injecteurs de drogues vivent avec ce virus. Cependant, ce rapport ne nous montre pas combien de ces personnes ont eu accès à des traitements efficaces contre l’hépatite C.

PILS a commandité une étude par TNS Analysis en 2015, étude comprenant tout un volet sur les chiffres de l’utilisation des drogues dans le pays, et qui a été partagée avec le comité. Ces données ont été volontairement ignorées, malgré nos requêtes répétées. Ce rapport a mis beaucoup plus d’emphase sur des données comme le nombre d’arrestations et les saisies de drogues, que sur la consommation elle-même, alors que nous voulons savoir si nos politiques en matière de drogues, et les actions lancées par les autorités ont eu un impact sur la consommation, l’offre et la demande de drogues et la santé des Mauriciens. Nous trouvons ces omissions regrettables.

Les objectifs de cet observatoire étant d’analyser et d’interpréter la situation des drogues chez nous, ce comité avait initialement fait des recommandations constructives. Cependant, à la veille de la publication, toutes les recommandations ont été enlevées, sous prétexte que cela ne faisait pas partie de son mandat. Nous questionnons sérieusement cela, car nous trouvons que c’est une opportunité manquée d’utiliser les données de ce rapport pour proposer des mesures d’action concrètes.

PILS préconise donc les recommandations suivantes :

  • Que l’observatoire des drogues revoie ses fonctions clés, et propose des recommandations concrètes en direction des stratégies de notre pays en matière de drogues.
  • Que la participation de la société civile sur ce type de comité ne soit pas purement figuratif, mais que nos suggestions soient prises en considération.
  • Que ce comité soit indépendant, et bénéficie de ressources appropriées pour fonctionner de manière effective.
  • Que la situation concernant l’usage de drogues en prison soit étudiée, et que ces données soient rendues publiques.
  • Que des études plus approfondies soient menées sur la situation de la consommation des drogues à Maurice, et leur impact sur notre société, car le gouvernement a la responsabilité d’informer la population à ce sujet.

Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons faire des avancées constructives dans l’intérêt de l’ensemble des Mauriciens.

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