Les lampes de Divali à peine éteintes, voila que Diya (lampe en Hindi) Beeltah se fait incendier. On aura beau faire semblant de découvrir, avec the Telegraph, le côté « alarming » du look de notre reine de beauté au concours Miss Universe, il est toutefois difficile de nier l’évidence. Tous ceux qui avaient vu le « costume national » choisi par le comité Miss Mauritius savaient déjà depuis un mois qu’on allait encore une fois faire rimer « Mauritius » avec « ridiculous ».

Lentement mais sûrement, là où « Mauritius, c’est un plaisir » a échoué, « Miss Mauritius, c’est un délire » est en train de s’affirmer lors des concours internationaux de beauté. Il y a d’abord eu Anais Veerapatren. Dont le Herald s’était gaussé en affirmant qu’elle paraissait avoir été « dipped in glue and then dragged through the jungle, with a skirt that seemed to have been carved from the remnants of camouflage netting in the army reserves. » C’était ensuite au tour de Laeticia Darche de taper dans l’œil de Time pour son costume « toilet paper ».

Nos miss sont à plaindre. Car après tout, c’est à elles que revient l’ingrate tâche de porter ces costumes et d’en défendre le « bon gout » urbi et orbi. Le public mauricien doit toutefois aussi comprendre que sa mission n’est pas de railler et vilipender ces jeunes filles dès que Time, the Herald ou le Telegraph sonnent la charge. Pour une raison très simple : nous ne pouvons plaider l’ignorance.

En effet, ce n’est pas en lisant la version électronique des titres de presse étrangers que nous avons découvert que les costumes nationaux de nos miss étaient soit laids ou ridicules. Pourtant à chaque fois, les critiques ne se sont amoncelées que quand les médias étrangers se sont mêlés à la partie. Pour ne rien arranger, les critiques – locales et étrangères ‑ ont systématiquement visé les miss au lieu de se concentrer sur ceux et celles qui année après année « commettent » ces habits les uns plus consternants que les autres.

Cette fâcheuse manie de ne regarder que là où se pointe un index accusateur étranger, s’installe durablement chez les mauriciens. Récemment, le doigt venu d’ailleurs a pointé « l’Ile de la Tentation » qu’est Maurice. Pour reprendre la description faite de notre pays dans un reportage retransmis sur la chaîne France Ô. Les hurleurs ne se sont encore une fois pas fait prier. Dénonçant avec force toutes ces « tentations » évoquées dans le reportage sur Maurice.

Mais quel est donc le scoop que France Ô a servi aux Mauriciens? Le fait que des salariés du tourisme vivant dans des conditions précaires gagnent Rs 5000 à Maurice ? La réalité de la drogue, de la distribution de méthadone et des programmes d’échange de seringues dans le pays ? La recrudescence de la prostitution dans les salons massage « spéciaux » ?

A moins d’avoir vécu sous un rocher pendant ces 30 dernières années, aucun mauricien ne peut prétendre n’avons jamais entendu parler des problèmes évoqués dans le reportage de France Ô. Pourtant c’est avec un catastrophisme aigu que chacun y est allé de son couplet sur cette « dure réalité » locale « enfin » dénoncée.

Mais encore une fois, on ne regarde que là où pointe le doigt étranger. En oubliant les questions essentielles. Est-ce que, par exemple, les règlements du Catering and Tourism Industries Remuneration Order sont bien appliqués ? Les mesures nécessaires sont-elles prises afin de régulariser la situation de salariés vivant dans des conditions précaires ? Est-ce que les programmes de distribution de méthadone ou d’échange de seringues sont efficaces en l’état ? Ou encore, est-ce qu’une politique appropriée d’aide sociale est en place pour empêcher qu’une femme mariée vivant en dessous du seuil de pauvreté n’ait recourt à un boulot à mi temps dans un « salon de massage » afin de garder la tête hors de l’eau ?

Au lieu de tout cela, le message retenu par les Mauriciens à la suite de ce reportage est que Maurice n’est pas un paradis et que l’envers de la carte postale est sombre. Quel scoop ! Du coup, on trépigne d’impatience à l’idée de lire ou regarder un autre sujet étranger sur Maurice. Qui sait, on pourrait découvrir que la corruption existe au sein de la classe politique locale. Quelle révélation ce sera alors !

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