La marmite politique est à nouveau en pleine ébullition. A en croire la dernière turbulence du côté des mauves. Est-ce à dire qu’un mercato s’opère dans la classe politique ? Du moins, plus de 25 membres ont quitté le comité régional No. 6 du MMM avec Vinay Sobrun qui s’est fait le porte-parole de ces démissionnaires. Ces derniers ont exprimé leur déception lors d’une conférence de presse, hier. Les raisons évoquées : « la gestion du comité régional du No. 6, l’attitude, l’inaction, le laisser-aller de la direction du MMM face à la situation qui perdure au niveau du comité régional et le comportement du MMM sur l’échiquier politique national ». Hormis cela, ce qui résonne le plus lors de la conférence de presse des démissionnaires est le fait que ces ex-membres n’étaient pas sur la même longueur d’ondes par rapport à la plateforme L’Espoir qui regroupe le PMSD, le Reform Party, le Rassemblement Mauricien et le MMM.

Le secrétaire général du MMM, Rajesh Bhagwan, a déclaré à ION News que les démissions qui ont eu lieu ne sont que du « cinéma politique ». Il en a profité pour expliquer que le MMM connaît une phase de réorganisation au sein du No. 6. « MMM abitie ek sa kalite show politik la… organize par gouverman », dit-il. Et de préciser que le MMM est pus fort que jamais et n’a aucune crainte par rapport à ces démissionnaires.

Les chiffres de Sobrun
Vinay Sobrun a expliqué dans une déclaration après la conférence de presse que Paul Bérenger a perdu les valeurs des militants. Selon lui, le MMM a perdu près de 50 % de ses votants au niveau national entre 2010 et 2019. Il affirme avoir compilé ces chiffres en tenant compte du nombre de votes que le MMM a eus durant les élections générales de 2010, 2014 et 2019. Selon lui, le MMM avait 42,01 % des votes en 2010, pour atteindre 20,9 % aux dernières législatives de 2019.

Même si dans la pratique, la base des votants ne peut être comptabilisée seulement par le nombre de personnes qui ont voté pour le MMM lors d’une élection, Vinay Sobrun affirme que ce chiffre ne peut être mis de côté car il démontre un certain recul sur le terrain pour l’emblématique parti des militants. Pour mettre cela en contexte, en 2010, l’électorat mauve n’a pas donné la chance à l’alliance MMM-UN-MMSD qui avait échoué aux élections générales. En 2014, l’association avec le PTr avait été désignée comme une trahison par les militants. Ces choix d’alliance pourraient expliquer ces chiffres. Il y a également eu des démissions des cadres du MMM dans le passé. Alan Ganoo a quitté le MMM en avril 2015 pour créer le Mouvement Patriotique et finalement entrer en alliance avec le MSM en 2019. Avec ce départ, le MMM a perdu un certain nombre de votants dans la circonscription numéro 14 où Alan Ganoo est surnommé « le roi de l’Ouest ».

Comme un air de ‘déjà-vu’, en août 2018, Steven Obeegadoo, Pradeep Jeeha et Françoise Labelle ainsi que 107 membres du comité régional de la circonscription numéro 17 quittent le navire mauve. Steven Obeegadoo déclare alors que « Paul Bérenger doit quitter les rênes du MMM ».

Par ailleurs, le MMM avait fait cavalier seul pendant les dernières législatives. Cette décision avait incité le retour des militants vers le parti. Qui ne se souvient pas que le MMM avait réuni une des plus grosses foules lors d’un meeting le 3 novembre pendant la campagne électorale de 2019, une semaine avant les élections générales. Les mauves avaient à eux seuls récolté plus de 20 % des votes sans être en alliance. L’Alliance Morisien 37 % des suffrages et l’Alliance Nationale plus de 32 % des suffrages.

Opportunités nouvelles pour les autres partis au No 6 ?
Depuis la démission de Vinay Sobrun et de ses acolytes, les rumeurs de rapprochement enflent dans les coulisses politiques. D’ailleurs, Vinay Sobrun a laissé planer le doute quand la presse lui a demandé s’il compte rejoindre un autre parti politique. On note que Vinay Sobrun n’a pas manqué d’égratigner Roshi Bhadain et la plateforme l’Espoir alors qu’il n’y a pas eu de commentaires négatifs à l’encontre du PTr et du gouvernement.
Au téléphone, ce mercredi, Mahen Gungapersad, député rouge de la circonscription numéro 6, a déclaré qu’il ne s’ingère pas dans la politique interne d’un autre parti et qu’il ne souhaite pas le malheur d’un autre parti politique. Mais il a aussi affirmé que la porte du PTr reste ouverte à tous pour discuter du travail à faire dans sa circonscription.

Le Premier ministre Pravind Jugnauth a fait alliance avec le ML d’Ivan Collendavelloo, le MPM d’Alan Ganoo et la Plateforme Militante de Steven Obeegadoo aux dernières législatives. Ce qui retient l’attention est que ces trois leaders sont des ex du MMM. Pravind Jugnauth n’a jamais caché le fait qu’il accueillera tous les membres et militants qui ne veulent plus entendre parler du MMM sous la bannière soleil. D’ailleurs, les discours du leader du MSM pendant la campagne électorale de 2019 ainsi que les discours politiques après avoir gagné les élections générales en témoignent. Ivan Collendavelloo, Steven Obeegadoo et Alan Ganoo soutiennent cette démarche pour regrouper les militants déçus du MMM à en juger leur discours politiques dans le passé. Cette nouvelle vague de démissions au No. 6 est une autre opportunité pour que le gouvernement consolide sa position dans une circonscription qui a été férocement disputée. Elle compte deux élus du gouvernement, Avinash Teeluck et Anjiv Ramdhany, et un député rouge, Mahen Gungapersad.

Ce n’est pas la première fois qu’un parti fait face à des démissions. Le PMSD a payé les frais des démissions de plusieurs membres en mai et juin de cette année, notamment Salim Abbas Mamode et Roshan Seetohul entre autres, de même que le PTr avec la démission de Mookhesswur Choonee en avril 2021. Nando Bodha avait démissionné en début d’année du MSM.
Ce qu’on retiendra c’est que, même s’il y a des démissions parmi les partis traditionnels, leur base de votants est bien ancrée dans la société mauricienne. Comme l’a dit Rajesh Bhagwan, « aprann fer ‘primaire’ avan al fer HSC ».

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