Le rapport de la commission d’enquête sur la vente des actions de Britam Kenya présidée par l’ex-juge Bushan Domah avec Sattar Hajee Abdoula et Imrith Ramtohul pour assesseurs, révélé mardi 27 juillet dernier à l’Assemblé nationale, fait toujours couler beaucoup d’encre. Depuis qu’il a été rendu public chacun y va de son commentaire. Rappelons que la commission avait invité toute personne à soumettre des informations ou à déposer devant elle sur la fameuse transaction mais pas un seul témoin ne s’est manifesté. Ce n’est que bien plus tard que certains se sont portés volontaires, soit bien après que la commission avait commencé ses travaux.

Dans l’ensemble, la commission a dû s’en remettre à elle-même pour convoquer les témoins susceptibles de faire la lumière sur le sujet. Certains d’entre eux ont dû être convoqués plus d’une fois pour vérifier la véracité de leurs déclarations. La commission révèle que l’une des contraintes majeures qu’elle a rencontrées a été l’absence d’enregistrements au niveau du ministère des Services financiers et de la bonne gouvernance et concernant la vente des actions Britam ainsi qu’au niveau des ‘Special Administrators’, de BDO et de toutes les personnes impliquées à l’époque des faits. Pourtant, il y avait eu plusieurs réunions relatives à la transaction au sein de ce ministère. Quelques témoins ont parlé de la manière singulière dont les affaires du ministère étaient conduites à l’époque, avec une contribution minimale des agents publics et une confiance maximale envers les conseillers politiques. D’autres témoins ont confirmé que tous les échanges de correspondance se faisaient par courriel. Lorsque la commission a demandé le dossier, celui-ci ne contenait presque rien concernant la vente.

L’absence de dossier n’a toutefois pas empêché la commission de reconstituer les événements qui ont conduit à la vente. Des archives existaient ailleurs. Il s’agissait d’une commission d’enquête complexe, pas comme les autres. Le type conventionnel implique des témoins locaux alors que cette enquête comprenait des témoins étrangers.

Dès mars 2018, la commission, par l’intermédiaire du bureau de l’Attorney General, avait sollicité l’aide des autorités kenyanes pour entendre des témoins identifiés au Kenya et qui, d’une manière ou d’une autre, étaient impliqués dans la vente d’actions Britam. Une procédure longue et frustrante, selon la commission. Le processus a été long à lancer et des rappels ont été constamment faits. Les témoins étrangers ne sont pas liés par les mesures coercitives de la loi mauricienne sur les commissions d’enquête si efficaces dans le cas des témoins locaux.

Lorsque la voie normale a commencé à faiblir, la commission a eu recours à la voie diplomatique pour obtenir des réponses. Il y a eu un premier engagement des Kenyans et une première communication écrite. Enfin, la commission a émis un ‘Salmon Notice’ mais en vain. Elle attend toujours une réponse. Cependant, cette relative réticence à collaborer et à coopérer n’a pas empêché la commission d’aller au fond des choses même si une audition viva voce aurait rendu les conclusions de la commission doublement sûres.

Rappelons que cette commission d’enquête a été instaurée suite à la vente de 23 % des actions que détenait l’ex-BAI au sein d’un groupe financier coté à la bourse de Nairobi, à savoir, Britam Holdings Ltd (Kenya). Cette commission avait pour but de faire la lumière sur les circonstances dans lesquelles les administrateurs spéciaux de la BAI, Yacoob Ramtoolah et Georges Chung, n’ont pas agréé à la vente de la BAI Company (Mauritius) Ltd et des actions de Britam Holdings Ltd (Kenya) pour la somme de Rs 4,3 milliards offerte par MMI Holdings Ltd, acheteur potentiel. A la place, ils ont procédé à la vente de ces actions aux actionnaires existants, à savoir Peter Munga et d’autres investisseurs au Kenya pour la somme de Rs 2,4 milliards, avec pour résultat un manque à gagner de Rs 1,9 milliards. Parmi les nombreuses recommandations de ce rapport, l’une est une enquête pénale pour faux ou usage de faux contre certaines personnes, entités et sociétés. Il a été recommandé que ce rapport soit transmis à la police pour des enquêtes sur d’éventuels délits de ‘forgery’ ou des infractions sous l’‘Insolvency Act’.

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