Quatre ans après avoir tapé sur les autorités mauriciennes pour leur propension à déporter les ouvriers étrangers qui protestent contre leurs conditions de travail, le Département d’Etat américain remet le couvert. Dans son dernier «Trafficking in Persons Report» publié cette semaine, Washington déplore que Port-Louis n’a rien entrepris pour empêcher des employeurs, notamment des petites et moyennes entreprises, de retenir les passeports des ouvriers étrangers. Elle évoque aussi le cas des logements mis à leur disposition qui s’apparentent à des centres pénitentiaires.

Le document souligne également que le gouvernement mauricien «does not fully meet the minimum standards for the elimination of trafficking», mais qu’il fait néanmoins des efforts. En augmentant les enquêtes et les poursuites sous la «Combatting of Trafficking in Persons Act» de 2009. Autre bémol : «coordination between law enforcement and prosecutors remained weak and the judicial process was slow, discouraging some victims from pursuing legal redress», ajoutent les auteurs.

«Efforts to identify victims decreased and, unlike last year, the government did not report investigating any employers that exhibited indicators of trafficking, such as passport retention», indique le rapport. Il recommande donc des mesures adéquates pour la protection des victimes de trafic humain, plus particulièrement envers les femmes engagées dans la prostitution et les ouvriers étrangers, surtout pour les hommes qui n’ont guère d’endroits où trouver refuge.

Washington préconise aussi une meilleure coordination entre les forces de l’ordre et la poursuite publique pour réduire le délai des procédures judiciaires. La mise sur pied d’un comité interministériel pour se pencher sur toutes les formes de trafic humain est proposée. Bien que la «Combatting of Trafficking in Persons Act» empêche la recrutement des travailleurs étrangers par des moyens frauduleux, elle n’a aucun effet sur les recruteurs opérant hors du pays, souligne encore les Américains.

Le Département d’Etat américain ne se prive pas de critiquer le ministère du Travail pour avoir «historiquement» traité des cas de trafic humain à travers l’arbitration ou la médiation plutôt que de se tourner vers la justice. Une telle attitude, fait ressortir Washington, permet aux brebis galeuses de «repeatedly commit trafficking offenses and face only administrative penalties». Une fois de plus, il considère que la «Special Migrant Workers Unit» de ce ministère ne dispose pas d’un nombre suffisant d’officiers pour veiller à ce que les droits des 37 000 ouvriers étrangers dans les secteurs manufacturier et de la construction soient respectés.

Il met aussi à l’index l’attitude du Passport and Immigration Office envers de jeunes Malgaches ayant moins de Rs 4 200 en poche à leur arrivée dans l’île. Elles sont tout bonnement déportées car soupçonnées de venir se livrer à la prostitution à Maurice… sans vérifier si elles ont été contraintes par un réseau quelconque.

Photo (archives) : Des ouvriers bangladais désemparés au siège du ministère du Travail, en 2015.

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