Les drogues font, certes, des ravages. Mais la répression, surtout à l’encontre des consommateurs, causent aussi des dégâts. Les intervenants lors du débat organisé à l’Institut Cardinal Jean Margéot, ce jeudi 25 juin, le reconnaissent tous. Et tous le disent : il faut revoir la politique nationale sur les drogues à Maurice. Avoir un plan qui considère la problématique sous l’angle de la santé publique, et plus seulement comme un problème à être gérer par les forces de l’ordre.

Le Collectif Urgence Toxida (CUT) et Pils planchent sur deux position papers qu’ils soumettront aux parlementaires, la semaine dernière. Les deux ONG y détaillent les « modèles de décriminalisation et de réglementation légale » qui ont « porté leurs fruits » à travers le monde, explique Kunal Naik. Car il est temps, dit le chargé de plaidoyer chez CUT, d’arrêter de « criminaliser » les usagers de drogue – et de faire la distinction avec les « trafiquants ».

La décriminalisation, dit Danny Philippe, implique la mise en place de tout un système d’accompagnement, et la participation de différents acteurs. Et contrairement aux idées reçues, poursuit le responsable de Leadership Empowerment & Action for Development (LEAD),  la décriminalisation n’entraîne pas une recrudescence dans la consommation de drogues. Et de citer les exemples de l’Uruguay – qui régule aussi la culture du cannabis –, de l’Etat du Colorado, ou encore du Portugal.

Danny Philippe, à l’initiative de ce débat qui a aussi vu la participation de l’avocat Rama Valayden, s’inquiète aussi du rajeunissement constaté dans le profil des consommateurs. La prise de drogue, affirme le responsable de LEAD, transcende les milieux sociaux, et concerne des collégiens de 13-14 ans.

Les positions papers contiennent aussi des propositions, telle la création d’un Observatoire des drogues. Cela permettra, explique Nathalie Rose, chargée de plaidoyer Pils, de répertorier les drogues, surtout synthétiques, qui circulent sur notre territoire et d’en connaître la composition. Les ONG actives sur le terrain pourront alors mieux informer les usagers sur les risques qu’ils encourent.

S’il salue la mise sur pied prochaine de la commission d’enquête sur les drogues, Kunal Naik espère toutefois que celle-ci ne se focalisera pas uniquement « sur les trafiquants et les lois ». Pour Nathalie Rose, la commission devrait se poser « les bonnes questions ». En considérant notamment l’incidence de la politique des drogues à Maurice, ces 25 dernières années, sur la baisse de la consommation et du trafic.

La UN General Assembly Special Session on Drugs (UNGASS) aura lieu l’année prochaine. De nombreux pays, dont ceux d’Amérique latine, souligne Nathalie Rose, se réuniront pour décider de la direction à prendre. Et de se demander : « Quelle position Maurice adoptera-t-elle ? »

Le 26 juin marque la Journée mondiale contre l’abus et le trafic de drogues. C’est aussi aujourd’hui que des ONG se sont rassemblées à Rose-Hill, sous la houlette de CUT, dans le cadre de la campagne Soutenir, pa pinir (Support, don’t punish). Au menu de cette après-midi d’activités qui vient de prendre fin : sensibilisation et concert avec la participation de Ras Nininn, Richard Beaugendre, Mika Ramsamy ou encore Jason Lily.

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