En entendant sir Anerood Jugnauth (SAJ) annoncer qu’il s’apprête à conclure son discours de plus de 2h30 sur le Budget, Pradeep Roopun déblaye à la va-vite son pupitre. Il range ses feuilles et attend le dernier mot du ministre mentor pour tap latab. Mais le ministre de la Culture est devancé par Stephan Toussaint.

Le ministre de la Jeunesse et des Sports est debout et applaudit, d’autres frappent leur pupitre en se relevant aussi. Voyant la standing ovation spontanée pour SAJ, Pravind Jugnauth et Ivan Collendavelloo se redressent aussi pour l’applaudir. Si le Deputy Prime minister serre la main à SAJ pour le féliciter, le Premier ministre est, lui, plus réservé. «Enn PMSD pa la, pena respe sa!» se désole Ravi Rutnah. Si Salim Abbas Mamode et Adrien Duval ont écouté SAJ durant quelques minutes après la pause déjeuner, ils se sont très vite éclipsés.

Quelques minutes auparavant, la longueur du discours du ministre mentor avait toutefois eu raison de plusieurs députés. Pendant que Bérenger se plaint du discours fleuve, Rajesh Bhagwan, affalé sur deux fauteuils, profite d’un somme. Nando Bodha, qui roupille aussi, se réveille malgré lui à chaque fois que Leela Devi Dookun-Luchoomun et Yogida Sawmynaden, ses voisins de gauche et de droite, se font la conversation. L’autre habitué des siestes parlementaires, Ivan Collendavelloo se force aussi à ne pas sombrer dans les bras de Morphée.

En face, dans les travées de l’opposition, à l’exception du député mauve de Beau-Bassin/Petite-Rivière, on a peu dormi… pour ceux qui étaient là. Les rangs de l’opposition étaient, en effet, clairsemés tout le long du discours de SAJ. Les critiques du ministre mentor au leader de l’opposition lui ont ainsi été adressées in absentia. Par contre, c’est en regardant droit en direction de Shakeel Mohamed et d’Arvin Boolell que le ministre mentor leur lance une flopée de piques.

SAJ en oublie parfois les précautions de langage. Traitant les critiques de l’opposition contre le Commissaire de police Mario Nobin de «bullshit». Ce qui conduit illico Shakeel Mohamed à protester. Maya Hanoomanjee est bien obligée de rappeler à l’ordre le doyen des députés. Celui-ci s’excuse et remplace le mot incriminé par un terme plus parliamentary.

Le chef de file du PTr à l’Asemblée nationale s’était aussi emporté au début du discours de SAJ. Mais face à la Speaker, les protestations sont restées vaines. Celle-ci faisant remarquer que le ministre mentor a écouté Shakeel Mohamed sans broncher quand celui-ci l’a critiqué avec virulence précédemment.

Arvin Boolell n’est pas en reste. Rappelant que le député de Belle-Rose/Quatre-Bornes est médecin, SAJ s’essaye à un jeu de mot sur les hémisphères «left and right» du cerveau de Boolell. Afin de mieux critiquer ses choix et son discours politique. «Kone kikenn inn ekrir sa pou li sa», tente de relativiser Mohamed. Pendant que les députés de la majorité rient aux bons mots de SAJ.

Celui-ci déroule son discours, et s’emmêle régulièrement dans ses pages et ses paragraphes. Mais Fazila Jeewa-Daureeawoo est là pour l’aider. La vice Prime minister vérifie méthodiquement si SAJ est en train de lire la bonne page. Toutes les feuilles du discours de l’orateur sont minutieusement numérotées et accompagnées d’un post-it pour faciliter le feuilletage.

Si Navin Ramgoolam et même son ancien ministre des Finances, Rama Sithanen, en prennent pour leur grade, c’est à Xavier Duval que le ministre mentor réserve ses critiques les plus virulentes. Accusant celui-ci de n’avoir pas cru dans l’Alliance Lepep et d’avoir fait le jeu de Navin Ramgoolam. SAJ consacre de longs pans de son discours à répondre aux critiques de Duval à l’égard de la performance de Pravind Jugnauth en tant que ministre des Finances.

Le ministre mentor énumère ainsi les mesures prises par Pravind Jugnauth en tant que Premier ministre, ministre des Finances et aussi ministre de l’Agriculture entre 2000 et 2003. Afin de démontrer la bonne gestion économique de Pravind Jugnauth. SAJ va même plus loin en commentant le style de son fils, en s’étonnant de la capacité de ce dernier à se rendre aussi souvent sur le terrain. Chose que lui-même ne faisait pas autant, se félicite le mentor.

«Ils disent que nous sommes contre les ti-dimounn… ils se prétendent protecteurs des ti-dimounn», a relevé le ministre de la Défense à l’entame de son discours, juste après la Private Notice Question. En parlant des rouges et des bleus. «Ils se prétendent les meilleurs gestionnaires (…) mais où étaient-ils en 1982 ?» a lancé SAJ avec hargne. Avant de se lancer dans un très long rappel de sa période de gloire et du «miracle économique» réalisé sous son leadership…

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