Etienne Sinatambou pénètre dans l’hémicycle pour tomber sur un Ezra Jhuboo occupé avec son chargeur de téléphone. Le ministre de la Sécurité sociale s’approche du député travailliste. «Ena 15 minit la», dit-il en lui proposant d’aller boire un café. L’élu de Savanne/Rivière-Noire (n14) est toutefois toujours occupé avec son chargeur. «Bon, to pe tro tarde twa, mo pe ale», lance Sinatambou avant de tourner les talons.

Paul Bérenger est, lui, toujours aussi appliqué. A peine arrivé, il est à sa place en train de disséquer la Private Notice Question (PNQ) sur Álvaro Sobrinho. Il souligne au stylo rouge des extraits de la question du jour de Xavier Duval.

Un peu plus loin, Roubina Jadoo-Jaunboccus a le même souci qu’hier. Elle a froid. La députée de Port-Louis Sud/Centre (n2) se plaint auprès d’un des préposés de l’Assemblée nationale. Mais ce dernier ne semble pas faire grand cas de l’inconfort de la Parliamentary Private Secretary. Elle se résigne donc à enfiler son pull. Yogida Sawmynaden a le même souci. «Mari fre sa!» se plaint-il auprès de son camarade de parti Gowkaran Oree.

Pour la chaleur, il faut regarder ailleurs, en direction de Showkutally Soodhun. Absent ce lundi et mardi, le ministre du Logement et des Terres fait son retour au Parlement. Il est accueilli chaleureusement par les députés des deux côtés de l’hémicycle. A peine arrivé, il file dire bonjour à Mahmad Kodabaccus, le secrétaire général du PMSD, assis dans la galerie publique.

Pravind Jugnauth et Ivan Collendavelloo sont, eux, d’humeur studieuse. Ils discutent des documents placés devant eux. Quasiment tous les députés sont à leur place et le début de la séance est imminent. Une sonnerie de téléphone rompt l’ordre qui commence à s’installer. C’est celle du député travailliste Osman Mahomed, qui a choisi le morceau phare du blockbuster bollywoodien Bahubali comme sonnerie. Amusés, les autres élus regardent dans sa direction. «Pou fer zot danse la», lance Shakeel Mohamed en direction des ministres. C’est la rigolade générale.

Sudhir Sesungkur va au front, ce mercredi. Il étudie donc ses réponses en prévision de la PNQ du leader de l’opposition. L’Attorney General est là pour le soutenir. Ravi Yerrigadoo lui glisse quelques mots à l’oreille avant d’aller se rasseoir à sa place. Le conseiller du Premier ministre Jean-François Chaumière en fait de même.

La sonnerie retentit. Le Parlement est en session, la PNQ débute quelques instants plus tard. Les premières minutes de l’échange Duval-Sesungkur sont déjà tendues. Le leader de l’opposition rappelant au ministre des Services financiers qu’il a intérêt à faire attention à ses réponses. En laissant entendre qu’il dispose de documents pour étayer ses dires. Deux rangées derrière Xavier Duval, Roshi Bhadain nargue le ministre : «Al okip to piti !» On renchérit du côté du MMM : «Alvaro la zot zafer sa.»

Fidèle à son habitude, Ravi Rutnah est complètement absorbé par l’échange. Quand Duval évoque un mail envoyé à Sesungkur, le député de Piton/Rivière-du-Rempart (no 7) devance même le ministre dans sa réponse : «Abe lontan li’nn gagne». Ce qui conduit des députés de l’opposition à lui rappeler que ce n’est pas à lui que la PNQ est adressée.

Les moqueries s’enchaînent. C’est même le ministre des Services financiers qui pose une question au leader de l’opposition. « Pa twa ki poz kestion!» proteste Adrien Duval. Le ministre a, lui aussi, du soutien. En quelques occasions, Ivan Collendavelloo se retourne pour souffler quelques mots à Sesungkur avant qu’il ne réponde à une question supplémentaire de Duval. Repris par les députés de l’opposition, Collendavelloo ironise. «Bhadain ti bizin asiz pre kot twa», dit-il en regardant en direction du chef de l’opposition.

Rutnah est, lui, toujours à l’attaque, Aurore Perraud tente de calmer ses ardeurs. «Al pran to kalkilatris», se moque la députée bleue. Roshi Bhadain cible Collendavelloo. En lui suggérant d’aller en Australie, là où Christelle Sohun, une intime du ministre, sera postée comme ambassadeur.

Le Deputy Prime minister semble faire peu de cas de la remarque du leader du Reform Party. Pour cause, il rit aux éclats. Il encourage même les députés de l’opposition : «Fer tapaz!» Un rire hystérique ponctue toutefois l’échange Duval-Sesungkur. On croirait une hyène lâchée en plein hémicycle, mais ce ne sont que les rires aigus de l’élu du Muvman Liberater Rutnah.

Sesungkur ne se laisse pas déconcentrer par le spectacle secondaire, il élabore sa réponse, ce qui contrarie Duval. Ce dernier montre son exaspération à la Speaker, mais Pravind Jugnauth ne l’entend pas ainsi. «To poz kestion, les li reponn.» Rajesh Bhagwan rétorque :« Boug-la inn menas zot», s’égosille-t-il en faisant allusion à l’influence d’Álvaro Sobrinho. «Avoka Alvaro twa?», renchérit l’élu mauve de Beau-Bassin/Petite-Rivière (no 20).

Quelques minutes plus tard, la PNQ se termine sur un cri du cœur de Roshi Bhadain en faveur de Maneesh Gobin. «Donn Maneesh fer minis, li pou fer pli bien», plaide l’élu de Belle-Rose/Quatre-Bornes (no 18). «Eh Maneesh! to ti bizin laba twa», assure Bhadain au Chief Whip en pointant du doigt la place du ministre des Services financiers.

A peine rassis, Sesungkur se lève à nouveau. Car il est le prochain député à intervenir sur le discours du Budget. Mais l’opposition ne l’entend pas ainsi. Bhadain est le premier à quitter l’hémicycle en signe de protestation. Il est vite rejoint par Adrien Duval, puis les autres députés du PMSD. Paul Bérenger quitte aussi la salle, suivi de la troupe du MMM.

Les députés de l’opposition, surtout Veda Baloomoody, donnent de la voix. Avant de quitter l’hémicycle, Adrien Duval et Roshi Bhadain lancent une dernière salve en direction de Sesungkur : «Demisione ta!» La réponse du Premier ministre fuse : « Parti tonkin. Ale ta!»

Les élus de l’opposition rejoignent l’hémicycle une trentaine de minutes plus tard, pour l’intervention de Salim Abbas Mamode. Ce sera cette fois-ci au tour de nombre de leurs collègues de la majorité de quitter la Chambre.

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