S’il y a un mal qui ronge les notes de musique sur la scène locale, c’est bien la guerre intestine entre les artistes sur des sujets insignifiants. La richesse musicale des uns contre la médiocrité sonore des autres.

Facebook est devenu la vitrine flagrante, pour ne pas dire affligeante, de cette culture. Exposant presque chaque semaine des chapelets de statuts coups de poing lourds, des crochets du droit saignants, des uppercuts percutants… Un vrai combat de boxe virtuel. Cette confrontation des genres nous détourne du vrai problème, qui perdure depuis des années dans le jardin mélodique : la professionnalisation.

A force d’injecter trop d’énergie dans des causes futiles, on quitte la route principale, laissant cette thématique sur le bas-côté. Alors qu’avec l’émergence des marchés de musique dans la région (Afrique du Sud, Réunion, Inde, Malaisie) depuis quelques années, la professionnalisation est au cœur des débats. Ce sujet est mis sous les projecteurs pour sensibiliser et former des acteurs culturels de ces pays à aller dans ce sens.

Le manque criant de structures compétentes pour soutenir l’artiste dans son développement à Maurice est palpable lors de ces marchés de musique. Soulignant l’urgence de poser des bases solides afin de permettre à la musique d’opérer en tant qu’industrie. Décloisonnant l’espace pour ne plus voir la musique comme de l’entertainment pur et dur mais comme un métier en tant que tel.

Certes, il y a des actions initiées ici et là allant dans ce sens, mais bon nombre maîtrisent l’art de l’esquive. Préférant évoluer comme des « artistes-artisans » ou « semi-professionnels » au lieu de combattre pour un véritable statut d’artiste, c’est-à-dire être reconnu par l’Etat comme un professionnel de l’art, un intermittent du spectacle, comme c’est le cas en France. Un intermittent du spectacle est « un artiste ou technicien qui travaille par intermittence pour des entreprises du spectacle vivant, du cinéma, et de l’audiovisuel ».

Une éducation culturelle devient importante, pas juste celle dispensée par des écoles de musique ou des conservatoires, mais une éducation cultivant le professionnalisme à tous les niveaux dans le secteur musical. Pour que demain, l’enfant qui veut devenir musicien ne se retrouve pas face à cette réponse stoïque de ses parents : « Ki lamizik to pe al fer, pa enn travay sa. » Face à une telle réplique, on jette l’éponge.

En attendant, les coups bas sont toujours permis sur Facebook ou ailleurs. Et les artistes maîtrisant l’art de l’esquive, comme les politiciens, continuent de masquer les sujets importants au détriment de polémiques stériles. Dans l’intérêt de qui ? La réponse est sur un autre ring. Viendra l’heure de « l’ultime mise aux poings » pour éviter le K.O.

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