Le Directeur des poursuites publiques passe à l’offensive. Après une protestation très énergique de la décision de réintégrer son bureau à celui de l’Attorney General, c’est en Cour suprême que Satyajit Boolell porte l’affaire. Il a déposé une motion, ce matin, contestant la décision du gouvernement. Il y explique pourquoi le bureau du DPP devrait continuer à jouir pleinement de son indépendance. Et comment, selon lui, tel ne sera pas le cas avec cette décision du Cabinet ministériel.

Satyajit Boolell fait un rappel historique de l’évolution du bureau dont il a aujourd’hui la charge, des années précédant l’indépendance à maintenant. Il se base pour cela sur les recommandations des législateurs qui ont rédigé notre Constitution mais aussi sur des rapports plus récents, dont celui de Lord Mackay. Ainsi, le Prof. de Smith, dans son Constitutional Commissioner Report de novembre 1964, considère que « the Director of Public Prosecutions should be given the judicial security of tenure which he enjoys under a number of other constitutions ».

Et de citer le rapport de la Law Reform Commission de mars 2009 à l’effet que « ‘the Office of the DPP must operate independently of the Office of the Attorney General’ and that this was ‘abundantly clear from the requirements of the Constitution’ ». Le rapport Mackay préconisait également la séparation d’avec le bureau de l’Attorney General, avec un staff légal qui n’aurait « d’autre responsabilités que celle relevant de la poursuite ».

Placer le bureau du DPP sous la tutelle de celui de l’Attorney General, argue Satyajit Boolell, va ainsi à l’encontre de l’esprit de la Constitution – qui garantit l’indépendance du bureau du DPP. Mais aussi de la lettre, en contrevenant à diverses sections, dont la section 72(6) qui stipule que : « In the exercise of the powers conferred upon him by this section, the Director of Public Prosecutions shall not be subject to the direction or control of any other person or authority ». Et parce que l’actuel Attorney General n’est pas un membre élu de l’Assemblée générale, la responsabilité du bureau du DPP ne peut lui échoir, selon ce que stipulent les sections 2, 62, 68 et 69 de la Constitution, poursuit Satyajit Boolell.

En outre, le public pourrait dorénavant avoir l’impression que les décisions du DPP sont « soumises à la direction et au contrôle de l’AG », ce qui risque de « miner sa confiance dans le système de justice pénale ». Cela en dépit des affirmations de Ravi Yerrigadoo.

Il existe aussi un risque que les law officers chargés des cas complexes ou impliquant des figures politiques soient dessaisis de certains dossiers pour faire autre chose. Le rapport Mackay estimait d’ailleurs « insatisfaisant », argue le DPP, le fait que « the prosecuting function should be discharged by people who at the same time have other functions to discharge such as advising other departments or drafting Bills » et ne sont pas sous le management du DPP. Ces même law officers pourraient aussi être sujets « à des pressions de la part de l’exécutif ». Entravant ainsi le bon fonctionnement de ce service.

Le DPP estime enfin que faire passer son bureau sous la tutelle de celui de l’Attorney General est une utilisation  peu judicieuse du pouvoir de l’Etat. Et de faire référence à certaines déclarations récentes du Deputy Chief Whip Ravi Rutna et du ministre Ivan Collendavelloo.

Par ailleurs, les membres du Bar Council n’ont pas eu à se prononcer sur le bien-fondé de la décision du gouvernement ce vendredi 20 mars. L’avocat Gavin Glover, qui était à l’origine de cette motion, l’ayant retirée car l’affaire a été portée en Cour.

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