Visualisez-vous une girouette ? Dans sa forme populaire, elle prend souvent la forme d’un coq qui va là où le vent souffle. Le PMSD, «zoli mamzel» autoproclamée de la scène politique, est à juste titre vilipendé pour son approche désinhibée face aux alliances. Xavier Duval et ses troupes s’étant résolus à se donner au partenaire qui leur offrira la dot la plus généreuse – investitures et chances de victoires aux législatives comprises. Cessons, toutefois, de nous moquer de la stratégie politique de Duval. Pour mieux nous intéresser à sa stratégie de communication. Ce mercredi, les bleus organisent en effet un évènement intéressant.

A la mairie de Vacoas, le PMSD convie ses sympathisants à un forum débat interactif autour du thème des jeunes en politique. L’approche est aussi intéressante qu’elle est justifiée par des statistiques implacables. La foule se rendant aux meetings et congrès suit, en effet, une tendance inversement proportionnelle aux Mauriciens qui préfèrent regarder les rassemblements politiques sur les plateformes d’ION News et d’autres médias en ligne installés. En cela, la campagne électorale des législatives sera celle qui verra le moins de sympathisants se déplacer aux rassemblements politiques.

Pourquoi en effet se déplacer ; endurer de pénibles trajets ; le trafic ; le risque de se faire esquinter son véhicule mal garé… quand on peut regarder le discours d’un leader politique en live. Sur sa télé, son ordinateur ou plus probablement son smartphone. Avec l’option de soutenir sa personnalité politique préférée à coup de limem meyer. Ou d’insulter l’adversaire honni dans un langage qu’on ne pourrait reproduire ici. Le tout à partir d’un clavier.

Ce que le PMSD organise ce mercredi ressemble à ce que pourrait être le futur du rassemblement politique local. Des sessions interactives, centrées sur des thèmes précis lors desquelles ceux qui briguent les suffrages écoutent les citoyens. Afin de leur expliquer ce qu’ils comptent faire, une fois élus, pour résoudre tel ou tel problème spécifique à une localité ou à une catégorie de la population.

Aux Etats-Unis, ce format de rassemblement politique, appelé Town Hall Meeting, est devenu une institution au fil des décennies. Certes, ce type de rencontre est très formaté avec des questions souvent «plantées» et reprises par des partisans triés sur le volet. Ils interrogent aussi bien les candidats à l’élection présidentielle que les aspirants sénateurs. Mais l’un dans l’autre, ce type d’exercice permet de focaliser le débat et le message des candidats sur quelques éléments précis. Evitant ainsi le galimatias que nous servent nos leaders politiques et leurs lieutenants lors de leurs sorties de campagne. Peu importe s’ils prennent la parole à La Gaulette, L’Avenir ou Sodnac.

Le changement d’approche dans la communication politique est essentielle car l’électorat a connu une mutation lente mais certaine ces dernières années. En effet, si les habitudes de vote de seniors ainsi que leurs préoccupations principales sont plus ou moins connues, celle d’une autre frange de la population a été bien moins étudiée et mesurée.

Le nouveau registre électoral, entré en vigueur ce 16 août, contient un chiffre intéressant. En effet, des 941 719 électeurs qui pourront s’exprimer aux prochaines législatives, 42,44% ont entre 18 et 40 ans. Dans certaines circonscriptions – Pamplemousses/Triolet (no 5); Montagne-Blanche/Grande-Rivière-Sud-Est (no 10); Vieux-Grand-Port/Rose-Belle (no 11) –, près d’un électeur sur deux a 40 ans ou moins. A Rodrigues, cette tranche d’âge représente la majorité (51,9%) des électeurs.

Les états-majors politiques auraient tort de ne pas tenir en compte les goûts et le comportement électoral – encore peu lisible – de cette catégorie de la population. Ce qu’on sait toutefois déjà, c’est que ce segment de la population a développé une grande méfiance vis-à-vis de la politique à papa. Il privilégie aussi les réseaux sociaux pour se faire une opinion sur la politique. Tout en exigeant une plus forte dose d’engagement et de redevabilité de la part de ceux qui briguent les suffrages et a fortiori des candidats qui souhaitent se faire réélire.

Nous avons déjà régulièrement évoqué, ici, les dérives inévitables lors de la prochaine campagne. Notamment à cause de l’usage abusif de technologies transformées en armes. Face aux dangers potentiels se trouve toutefois également une formidable opportunité. Paul Bérenger en appelle au sursaut de conscience des jeunes. Navin Ramgoolam ne jure que par sa politique de rupture. Tandis que Pravind Jugnauth se pose en Premier ministre moderne. Se pourrait-il qu’ils optent pour une campagne civilisée faisant surtout appel à l’intelligence des électeurs et non à leurs bas instincts ? On peut toujours rêver…

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