«La meilleure contribution que peut faire le Royaume-Uni au continent africain est de libérer immédiatement – aujourd’hui, et non demain – les Chagos et de reconnaître le droit de retour des Chagossiens.» L’Union africaine (UA) a pesé de tout son poids à la Cour internationale de justice (CIJ). Et sa position est sans équivoque.

Cette affaire ne concerne pas seulement la colonisation mais aussi les droits humains et le droit international. «This is a voice to be heard, it is not only the voice of Ms Elysé or the Chagossians, this is the voice of justice, self-determination… ending colonizsation… which should not be forgotten during the Court’s deliberations because it is the voice of a continent that has suffered from colonisation; it is the voice of Africa», a soutenu Namira Negm devant les juges à La Haye, le 6 septembre.

L’ambassadrice et conseillère juridique de l’UA, Mohamed Gomaa et Makane Mbengue ont, tour à tour, pris la parole au nom des 55 Etats membres, et clôturé les débats dans le cadre de l’avis consultatif demandé par Maurice.

Namira Negm a démonté les arguments présentés par la Grande-Bretagne. S’étonnant qu’«un colonisateur vienne demander au colonisé de produire des documents de ses archives». Qu’«un pouvoir colonial parle de libre-arbitre du colonisé qui était, à l’époque, sous son joug». «Cela fait mal, a soutenu la chef de la délégation de l’Union africaine, de se présenter au vingt-et-unième siècle (…) pour contester un appel du colonisateur qui débat du consentement du colonisé pour conserver une partie de son territoire, ou il n’y aurait pas d’indépendance».

En 1965, les dirigeants politiques mauriciens ont donné leur accord pour l’excision «par désespoir pour l’indépendance». Du reste, si l’argument de la distance entre l’archipel et Maurice est censé jouer en défaveur de l’Etat insulaire, «on se demande quelle est la situation géographique entre le Royaume-Uni et les Chagos».

Le Royaume-Uni a fait référence à des propos de Sir Seewoosagur Ramgoolam sur les événements de Lancaster House en 1965 ? Il fallait bien qu’il «rappelle à tout le monde qu’il avait obtenu quelque chose du pseudo-accord» qui a découlé des discussions à Lancaster House, a fait remarquer Dr Negm.

Photo (www.icj-cij.org) : La délégation de l’Union africaine à La Haye.

L’UA, a rappelé sa chef de délégation, a été «le principal rédacteur et catalyseur» derrière cet avis consultatif à la CIJ. Car pour les 55 Etats membres – dont certains ont tenu à faire des présentations orales cette semaine –, il est clair que la décolonisation de Maurice est incomplète «à cause de l’excision des Chagos». Que les Britanniques occupe «illégalement», a soutenu Dr Negm.

Depuis sa création, l’UA s’est battue pour la décolonisation et l’autodétermination des peuples. Dans son exposé, Namira Negm a contrecarré les arguments des Britanniques. «La Grande-Bretagne a dit, lors de son plaidoyer, qu’il n’y a aucun lien géographique entre Maurice et les Chagos. Dans ce cas, quel est le lien géographique entre le Royuame-Uni et les Chagos ?» a-t-elle demandé.

Revenant sur le «pseudo-accord» de 1965, elle a affirmé devant les juges que cela a été accepté par désespoir. La conseillère juridique de l’UA a aussi rappelé des extraits de sir Seewoosagur Ramgoolam devant le Parlement cités par la Grande-Bretagne. Selon elle, il faut garder en tête que la Grande-Bretagne avait promis de rendre les Chagos à Maurice.

Mohamed Gomaa a, pour sa part, souligné que le Royaume-Uni et les quelques pays qui le soutiennent n’ont pas démontré en quoi il s’agit d’un différend territorial bilatéral. Or, il n’est pas question dans cette affaire de frontières à redéfinir. Du reste, le Royaume-Uni a «continuellement» confirmé son obligation de restituer l’archipel quand il ne serait plus requis à des fins de défense nationale. «Légalement, cela signifie qu’il reconnaît les Chagos comme territoire mauricien.»

Le professeur Makane Mbengue s’est appesanti sur les résolutions votées aux Nations unies portant sur la décolonisation. Tout en soulignant que le droit à l’autodétermination est «imprescriptible».

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